Accepter nos faiblesses, nos handicaps

Nous sommes faits de la même matière, d’un assemblage des mêmes composantes. Mais chacun est unique. Nous avons des capacités qui sont différentes de celles de notre voisin. Nos incapacités, nos insuffisances, nos faiblesses elles aussi sont différentes de celles de notre voisin.

Pour nous insérer dans la vie nous devons nous appuyer sur des forces, des dons que nous choisissons de développer, d’exprimer. Ces choix sont orientés par les circonstances mais aussi par le milieu, la société dans laquelle nous évoluons.

En contrepartie nous ignorons nos parties faibles, nous les laissons en sommeil en évitant qu’elles apparaissent au grand jour, nous les rejetons. Quand les évènements extérieurs ou notre voisin les mettent en lumière ça fait mal.

Cette démarche est bien naturelle mais si elle dure trop longtemps, au delà du nécessaire, un manque se fait sentir. Nous fonctionnons qu’avec une partie de nous-mêmes. L’autre en nous, la faiblesse, réclame à être reconnue, acceptée, aimée. L’union de notre personnalité, notre totalité aspire à être vécue, à s’incarner.

Dans les contes de fées ces faiblesses non reconnues sont par exemple l’enfant trouvé ou le troisième fils d’un vieux roi qui est considéré comme simple d’esprit alors que ses frères sont vifs et intelligents. Ce vieux roi est faible et sent qu’il va mourir. Pour choisir lequel de ses trois fils héritera de son royaume il leur donne des épreuves  que le troisième fils réussit devant ses frères. Ainsi le simple d’esprit obtient la couronne, épouse la belle jeune fille rencontrée lors des épreuves et régnera avec sagesse pendant  de longues années.

Dans le rêve suivant ces faiblesses sont représentées par une personne.

Rêve – Le cours de natation

J’arrive au bord d’une piscine pour suivre un cours de natation animé par Marie. Je suis en retard. Ils ont déjà plongé et avancent sous l’eau jusqu’à l’autre bord. Puis ils restent un peu sous l’eau et remontent à la surface. J’ai plongé à leur suite. Pas facile d’avancer en restant sous l’eau. Au bout, en atteignant l’autre bord, j’ai essayé de rester sous l’eau sans respirer. A un moment j’ai senti que j’avais respiré mais l’eau n’était pas entrée en moi.

L’eau est un symbole de l’inconscient, de l’irrationnel,  des eaux primordiales d’où nous venons, de notre mère nature. En naissant sur la terre s’est développé notre moi rationnel qui est nécessaire pour survivre. Mais l’inconscient en nous reste très important et difficilement abordable par le moi (cf « Préambule »  voir « l’inconscient et moi » et « l’accueil des rêves »).

Dans ce rêve le rêveur (son moi conscient) est en formation pour apprendre à pénétrer dans son inconscient (nager sous l’eau). Ce n’est pas facile pour lui d’avancer dans ce monde inconnu. Il n’est pas très à l’aise ce qui peut expliquer son retard. Par ailleurs il ne doit pas respirer de peur d’être submergé, de disparaître, de retourner à l’état d’inconscience. Or à sa grande surprise il arrive à respirer sous l’eau sans être envahi. Il semble qu’il ait trouvé intuitivement cet état où son moi peut être en contact avec l’inconscient sans danger.

Nous pouvons remarquer que sa formation est très progressive, sécurisée. Il n’est pas lâché seul en pleine mer. Cela se passe dans une piscine avec la sécurité de l’autre bord qui ne semble pas très loin et avec l’encadrement de cette femme, Marie. Dans la réalité concrète ce rêveur fait un travail sur ses rêves. On peut considérer que ce travail correspond à cette formation dont le but est d’être à l’aise dans l’inconscient sans être submergé.

Mais Marie, la formatrice du rêve, n’est pas son interprète de rêve. Qui est-elle? Le rêveur dit qu’elle est une amie proche. C’est une femme très simple, très gentille qui ne se met jamais en avant. Elle a du mal à s’affirmer dans la vie, à s’exprimer. Elle reste dans l’ombre. Intérieurement elle est une ombre du rêveur qui est repoussée loin du moi. Le rêve montre qu’elle a une importance fondamentale pour lui, qu’elle peut lui apprendre à être à l’aise avec son inconscient mais pour cela il doit être à l’écoute de cette faiblesse en lui.

Dans les rêves les faiblesses peuvent également être représentées par une personne en situation de handicap comme dans le rêve suivant. Le rêveur était le même que pour le rêve précédent.

Rêve – Regarder attentivement et comprendre…

Je suis avec d’autres dans une petite pièce comme dans l’entrée de mon entreprise ou dans un stage de formation. L’animateur arrive. On me dit qu’il a eu un AVC au nez. Que c’est en lien avec le TGV.  Je suis étonné. Je savais qu’il avait eu un AVC mais au nez?

L’animateur nous explique ce qui est prévu. Il dit qu’un handicapé va venir nous faire une présentation ou un spectacle. Il nous faudra le regarder attentivement et comprendre… Il dit une phrase très alambiquée qui comprend plusieurs fois le mot « sens » dans des sens différents. Les autres font un oh! d’admiration. Moi, je n’ai pas trop compris.

L’animateur du rêve, le rêveur le connait bien. C’est un collègue. Il le décrit comme quelqu’un qui est très centré sur lui sur ses intérêts, son pouvoir. Il écoute peu les autres mais sait donner une bonne image de lui. Collectivement il est bien vu malgré des critiques qui se disent en privé. Il sait se faire bien voir par la hiérarchie qui lui a donné de grosses responsabilités. Il est centré sur l’action, autoritaire, efficace, pas psychologue. Il est extraverti alors que le rêveur est plutôt introverti. C’est une partie inconsciente du rêveur.

Dans le rêve nous comprenons que cette partie du rêveur a bien changé probablement grâce à son AVC. Cet AVC est en lien avec le TGV. Le TGV, Train à Grande Vitesse, peut exprimer ici que cette partie en lui qui est associée à la grande vitesse c’est-à-dire à son désir d’agir vite, efficacement, a eu un accident cérébral, un accident dans le fonctionnement de son cerveau. De cela le rêveur en est conscient par contre il ne sait pas que cet accident est en lien avec le nez. Le nez est l’organe de l’odorat qui nous permet de sentir. Intérieurement c’est sentir une ambiance, sentir quelqu’un par exemple dans l’expression « je ne le sens pas ». C’est un sens tourné vers l’intérieur des situations, qui permet de voir au delà des apparences. A lire la suite du rêve il semble que cet accident lui ai permis d’accéder à cette intériorité à ce sens subtil comme diraient les pratiquants de yoga.

Cette partie du rêveur a vraiment bien changé puisqu’il est maintenant formateur pour apprendre aux autres, et en particulier le rêveur (son moi conscient) à accéder à ce nouveau sens. Pour cela il leur demande de regarder attentivement et comprendre, c’est-à-dire assimiler, comment se comporte une personne en situation de handicap. Chacun sait que le manque, l’handicap permet à la personne de développer d’autres sens, d’autres capacités en réorientant l’énergie non utilisable vers d’autres directions. 

« Il dit une phrase très alambiquée qui comprends plusieurs fois le mot « sens » dans des sens différents. » Le moi du rêveur ne comprend pas. Il est perdu par cette phrase qui joue avec le mot « sens ». Pour lui elle ne fait pas sens! Pour l’instant il a à sa disposition une méthode qui est celle de chercher à regarder ses handicaps et à les comprendre ce qui un jour lui permettra d’accéder à ce sens.

Ce rêve nous montre que,  bien qu’il soit introverti, le rêveur a encore beaucoup de chemin à faire, de travail, pour accéder à l’invisible que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Bien que cela ne se voit pas à première vue il fonctionne comme son collègue dans l’urgence de l’action, la recherche de l’efficacité immédiate. L’évolution de l’image de ce collègue en lui va l’aider  à avancer sur ce chemin.

Ce rêve nous montre également que, contrairement à ce qui est admis en général, l’évolution d’une personne ne passe pas uniquement par l’effort du moi pour se changer mais aussi et souvent par une évolution dans son inconscient (ici le collègue) qui peut aboutir à une évolution du moi. Cette évolution de l’inconscient peut provenir d’évènement extérieurs ( par exemple un AVC), d’évènements intérieurs profonds qui ne semblent pas avoir de causes et aussi d’efforts du moi pour se changer même s’ils paraissent à postériori inadaptés.

Je ne résiste pas à faire le parallèle  entre l’orientation générale de notre société occidentale (et même mondiale) toute tournée vers l’urgence de l’action, la recherche de l’efficacité, de la vitesse, du pouvoir, la défense des intérêts particuliers… et l’attitude de ce collègue. Cette orientation générale pèse sur chacun d’entre nous comme une injonction plus ou moins consciente. Faudra-t-il que notre société, elle aussi, ait un AVC au nez pour qu’elle puisse sentir ce qui se trame?

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