Mourir à soi-même – Mourir pour renaître

Les rêves qui vont suivre sont arrivés récemment chez des personnes différentes. Ils peuvent être réunis par une phrase qui apparaît dans l’un d’eux. « Mourir à soi- même ».

Que peut signifier cette expression? Mourir, nous connaissons :  c’est la mort du corps. En même temps on peut supposer que c’est la mort de la conscience, du moi conscient, du je. On n’en sait rien. En général on aimerait bien que ce moi ou une partie de ce moi continue à vivre car sa disparition nous fait peur. Ce serait la disparition de tout ce qui nous rassure, ce serait le néant, le chaos, le trou noir… Qu’en disent les rêves?  A ce sujet lire l’article La mort dans les rêves .

Dans  « Mourir à soi-même »  il n’y a pas la mort du corps, il y a seulement la mort du moi.  Ce mourir à soi-même c’est un peu ce qui se réalise tous les soirs quand on s’endort. Le moi perd peu à peu de l’énergie pour disparaître. Le lendemain matin il réapparait mais pas complètement identique à la veille. C’est  une renaissance car nous savons que le sommeil est réparateur. L’énergie est revenue, la fatigue de la veille a disparu, des conflits ont pu être résolus, des problèmes ont pu trouver une solution. Bien entendu ce n’est pas toujours aussi idéal. Quand la fatigue, les conflits sont importants le moi a du mal à lâcher prise et le sommeil est moins (ou plus) réparateur ou on n’arrive pas à dormir. C’est ce qui semble être de plus en plus le cas dans nos sociétés où le moi se croit tout puissant, il essaye de tout régler et ne sait plus s’abandonner pour laisser la place à plus grand que lui, à l’autre qui est aussi lui, cet autre que le moi ne sait pas maitriser car il lui est inconscient. Cet autre plus grand c’est notre personnalité toute entière avec nos capacités mais aussi nos faiblesses  qui a été nommé le Soi par C.G. Jung, que d’autres appellent le Graal, la Pierre philosophale, le Tao, la Déesse, Le Dieu, …

 

Rêve – Le gros cobra

Dans une sorte de hangar un gros cobra est arrivé. Il s’est enfilé dans un tuyau d’arrosage. On voyait un gros renflement à un endroit qui devait correspondre à sa tête. Je me dis que nous étions protégés car il était coincé là.

Plus tard des gens ont vu que du tuyau sortait une sorte de liquide visqueux blanc. Dans ce liquide je vis comme un minuscule futur poisson. En fait je compris que le cobra avait pondu des œufs. Il y en avait partout. Tout était blanc. Quelqu’un a voulu chercher une solution pour se débarrasser de ce liquide. Mais c’était trop énorme pour que nous puissions y arriver seuls. Nous allions bientôt être envahis par une multitude de cobras.

Je décidais de téléphoner à la mairie pour qu’elle intervienne.

Le cobra est un serpent. Le serpent est cet animal à sang froid qui correspond à nos origines, à notre instinct. Il représente souvent tout ce qui est inconscient en nous. Il apparaît parfois dans les rêves de personnes qui commencent un travail à partir des rêves. En général il fait très peur. Par exemple : dans une pièce où se trouve la rêveuse des serpents se faufilent sur le sol. Apeurée, elle se précipite sur la table pour se protéger. Autre exemple :  une rêveuse est en train de relever une bouche d’égout. Des serpents commencent à vouloir sortir. Affolée elle referme vite la bouche d’égout.

Le cobra est un serpent très dangereux. Il évoque l’Inde où les serpents ont toujours fait l’objet d’une grande vénération. Ils représentent un très grand danger et en même temps des Dieux de la terre, du monde souterrain. Le rêveur pratique le yoga. Dans le yoga la Kundalini est une énergie vitale endormie, enroulée au bas de la colonne vertébrale. Quand elle s’éveille pour remonter le long de la colonne vertébrale sous la forme de deux serpents, elle conduit à la réalisation du Soi ou de l’éveil. Mais si l’adepte n’est pas préparé, fortifié à la réception de cette énergie puissante, elle peut créer de gros dégâts dans son corps et/ou dans son psychisme. C’est la source, l’énergie vitale qui génère la vie mais  aussi la mort comme peut l’être l’inconscient ou le symbole de la mer. Cette mer qui est à l’origine de la vie et de sa perpétuation  mais aussi celle qui submerge et noie ses enfants. Les symboles de la mer et du serpent expriment bien ce que représente pour nous l’inconscient.

Dans ce rêve le cobra s’est enfilé dans un tuyau d’arrosage. Dans le tuyau d’arrosage l’eau (l’inconscient) est canalisée. Elle est indispensable pour arroser les plantes pour aider à la vie. Elle n’est pas dangereuse comme peut l’être parfois la mer. Le rêveur se sent protégé. Cette protection, il semble que ce soit l’inconscient qui l’aie décidée car c’est le cobra lui-même qui s’est enfilé dans le tuyau d’arrosage. Cela correspond à ce que l’on peut remarquer dans les rêves en général. Ils tentent d’amener à la conscience des éléments qui ne sont pas loin de cette conscience. Il y a vraiment une pédagogie des rêves. En utilisant la vision indienne on pourrait dire que les rêves ne réveillent pas la Kundalini tant que le rêveur n’est pas prêt à la supporter.

Le rêveur dont il est question ici travaille sur ses rêves depuis pas mal de temps. Il semble que l’inconscient ait décidé maintenant de le bousculer par l’arrivée de cette multitude de cobras.  Peut-être est-ce pour lui montrer qu’il n’est pas tout puissant, qu’il ne peut pas tout régler. C’est ce qu’il semble comprendre puisqu’il s’adresse à plus grand que lui, à la mairie.  La mairie, symboliquement,  représente l’intérêt général de toutes les personnes habitant sur le territoire de la commune. Elle représente l’intérêt général de toute la personnalité du rêveur et non seulement du moi. Ici c’est un symbole du Soi.

Cette arrivée d’une multitude de cobras peut être considérée également comme la décision par  l’inconscient de permettre au moi de mourir afin qu’il puisse se régénérer et laisser s’exprimer la créativité, le neuf. C’est ce que nous constatons régulièrement dans les rêves et dans la vie des rêveurs pour lesquels  des évènements difficiles et douloureux préparent des changements importants.

Voici le rêve qui a suivit dans la même nuit.

Rêve – La lutte contre le fascisme

Une sorte de colloque, une rencontre entre des Français et des Italiens. Les Italiens sont très sympathiques. Nous parlons de guerres. Ils nous parlent de comment ils ont lutté contre le fascisme et que chaque fois ils étaient tués. L’un d’eux avec qui je parlais me dit : Et vous, que ferez vous quand cela arrivera ?

Pour comprendre les rêves et pour comprendre les mouvements du psychisme, il est souvent très utile de ne pas isoler les rêves, de pouvoir les rattacher à d’autres de la même période. C’est d’autant plus vrai pour des rêves qui ont eu lieu dans la même nuit.

Dans celui-ci il est question de guerres, de morts et de lutte contre le fascisme par des Italiens qui sont très sympathiques. Pour les français, les Italiens évoquent souvent la joie, la gaieté, l’amour… bien que dans leur histoire ils aient eu des vies très difficiles (pauvreté qui s’est traduite par une émigration importante, le fascisme…). Le fascisme représente une période très noire qui a tué beaucoup de gens et qu’il faut combattre à tout prix. C’est le diable, la mort. Mais n’oublions pas que ce combat est réalisé par des Italiens sympathiques qui représentent la vie dans toute sa beauté.

Pourquoi cette phrase :  » Et vous, que ferez vous quand cela arrivera ? « . L’interprétation d’un rêve comme sur ce site est faite avec des mots, des concepts… Il est très facile pour le moi d’en rester à un niveau intellectuel, de se gargariser de mots, de belles phrases, et de ne pas s’engager, s’engager réellement dans un processus de transformation.

Par rapport au rêve précédent le fascisme représente cette arrivée d’une multitude de petits cobras qui vont se développer, envahir toute la personnalité et détruire le moi rationnel. Contrairement au rêve précédent ici il est question pour le moi de se battre avec toute son énergie contre cette force irrationnelle représentée par le fascisme bien que l’issue soit sa mort.

Pourquoi cette contradiction entre les deux rêves ? Ce n’est pas une contradiction mais un complément.  Dans les moments très difficiles le moi doit accepter sa faiblesse et s’adresser à plus grand que lui mais cela ne doit pas s’accompagner d’une démission de sa part. Parallèlement il doit s’engager et se battre même si l’issue lui semble perdue d’avance. Il y a une apparente contradiction si nous sommes uniquement sur le plan conscient, rationnel.

 

Rêve – Mort de mon amie.

Mon amie est morte… C’est très difficile à accepter. Je ne peux pas… C’est pour moi un anéantissement… J’ai très peur.

Je compris qu’il me fallait mourir à moi-même. Cela m’a soulagée. Sa mort n’avait plus d’importance.

Cette compréhension m’a permis d’accepter cette mort qui devenait la Vie.

La rêveuse dit : « En me réveillant j’ai eu la vision de mon amie morte mais j’étais bien. Je n’étais pas du tout affectée. La phrase « mourir à moi-même » avait recréé la vie. »

Que représente cette amie qui existe réellement dans la vie extérieure de la rêveuse?  Elle la décrit comme une jeune femme très volontaire qui veut toujours bien faire, qui est en permanence dans la recherche de la perfection. 

Quand le moi est à la recherche de la perfection il cherche à tout maitriser pour donner une bonne image à l’extérieur et à lui-même. Il refuse de voir la réalité, celui qu’il est vraiment et qu’il cherche à refouler dans l’inconscient. En faisant cela il crée un conflit entre ce qu’il est et ce qu’il voudrait être.

Quand on demande à la rêveuse si elle est perfectionniste elle répond non, qu’elle ne l’a jamais été. Et c’est bien l’image qu’elle semble donner à ses proches. Mais si on insiste en lui disant que le rêve semble dire le contraire elle réfléchit et réponds :  » oui depuis toute petite j’essaye de bien faire, d’être perfectionniste mais je n’y arrive pas. Cela ne m’empêche pas d’essayer quand même. »

Ce rêve lui montre qu’elle est en train de se débarrasser du conflit en elle, qu’elle est en train d’accepter ce qu’elle croit être une faiblesse qui est son incapacité à bien faire dans certaines situations. Ceci ne veut pas dire qu’elle arrêtera de faire des efforts mais cela ne se fera pas toujours et dans ces cas en toute conscience, en restant elle même.  Car ce « bien faire » est ce qui est considéré comme normal par son environnement, la société, ce qui ne veut pas dire que c’est normal. Si elle décidait de ne plus jamais faire d’effort dans ce sens elle se couperait des autres, elle s’isolerait du monde, elle s’enfermerait dans la certitude d’avoir raison. Or l’être humain a besoin des autres pour vivre, ces autres qui apparaissent dans ses rêves comme des parties de lui.

Cette mort en elle lui a apportée la vie.

 

Rêve – La fin du monde approche.

La fin du monde approche. Avec toute une foule je vais devoir partir par la mer vers… un au-delà. Ma mort approche. Pour partir je veux emmener quelques affaires. Je descends pour trouver un petit sac dans lequel je mets du sel, du poivre, un livre, un masque pour me protéger du Covid. Par la suite je réfléchis et me dis que je n’en aurai pas besoin puisque je vais mourir. Dans la foule qui va partir je rencontre une ancienne collègue qui accepte son départ sans difficulté.

De nombreuses personnes, parmi elles beaucoup de jeunes, arrivent par la mer en marchant sur l’eau. Elles sont habillées de couleurs chatoyantes. Elles viennent nous chercher.

 » Je me suis réveillée très heureuse, très détendue. »

La fin du monde c’est la fin de son monde. Ce n’est pas facile d’accepter cette fin car son annonce ne nous dit pas s’il y a quelque chose après et  si ce quelque chose existe  comment il est. Dans ce rêve la rêveuse n’a pas le choix. Elle doit partir pour cet inconnu qui lui fait peur. Alors pour se rassurer elle veut emporter quelques petit objets, comme pour faire que l’ancien monde se perpétue dans le nouveau. Mais elle perçoit assez vite  que ce besoin est illusoire. Elle doit « se jeter à l’eau ». Pour cela elle est aidée par sa rencontre avec son ancienne collègue qui accepte son départ sans difficulté. Quand on l’interroge sur cette ancienne collègue elle dit que c’était quelqu’un de très tendu, crispé, que depuis peu elle est en retraite et que sa vie a complétement changée. Elle est très heureuse, détendue et rayonne.

La fin du rêve lui ôte les quelques appréhensions qui lui restaient. Elle est accueillie par la jeunesse dans la joie, la bonne humeur, une lumière de toutes les couleurs. Il y a quelque chose du miracle chez ces jeunes qui marchent sur l’eau.

Ce rêve exprime bien ce qui se passe dans la vie extérieure de la rêveuse. Des transformations importantes, des lâchers prises, des ouvertures qui font suite à des appréhensions, des difficultés de toutes sortes y compris physiques.

Dans l’interprétation des rêves de cet article nous nous sommes intéressés à ce qu’ils représentent intérieurement pour les rêveurs en lien avec leur vie personnelle mais, à leur lecture, on ne peut pas s’empêcher de penser à la situation extérieure, collective que nous vivons tous. La peur ou le refus de voir concernant  : Les catastrophes climatiques qui se déroulent sous nos yeux et celles qui s’annoncent. Elles  sont la cause du comportement de l’homme envers la nature (la nature inclut le végétal, le minéral, l’animal dont les êtres humains. Elle est aussi l’inconscient de l’humain) .  La montée des autoritarismes, des fascismes, des guerres. La possession par la dualité ( Nous ne voyions les problèmes que par deux solutions opposées et nous nous sentons obligés de choisir l’un des deux camps) … 

L’intérieur, le personnel et l’extérieur, le collectif sont intimement liés comme la mort est intimement liée à la vie que ce soit dans les rêves ou dans la réalité extérieure.

A ce propos voici ce que disait Krihnamurti 

Ces phrases sont les dernières de son livre « Dernier journal »

Et devant cette feuille morte dans toute sa beauté, sa couleur, peut-être pourrions-nous être conscients au plus profond de nous-mêmes, saisir ce que doit être notre propre mort, non pas à la fin ultime, mais au tout début de notre vie. La mort n’est pas une chose horrible, une chose à éviter, à différer, mais plutôt une compagne de chaque jour. De cette perception naît alors un sens extraordinaire de l’immensité.

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