La guerre entre les opposés. Comment s’en sortir?

L’homme est perpétuellement pris en tenaille, écartelé, entre des opposés. Des opposés qui font partie de sa vie, qui font partie de lui mais aussi de toute l’humanité. C’est à la fois son problème personnel et celui de l’humanité toute entière.

Il est pris entre le ciel et la terre, l’esprit et la matière, l’intérieur et l’extérieur, le bien et le mal, le bonheur et le malheur, le jour et la nuit, conscient et inconscient, ordre et désordre … mais aussi plus concrètement entre l’attitude masculine et l’attitude féminine, l’attitude extravertie et l’attitude introvertie, la raison et l’irrationnel, l’individuel et le collectif, moi et les autres, pensée et sentiment, intégration et marginalité, agir et ne pas agir etc, etc.

Il est pris dans la dualité.

Cette situation crée en lui une énorme souffrance qui peut être consciente quand par exemple il n’arrête pas de changer d’avis sur un même sujet, mais aussi très souvent inconsciente ou diffuse. Pour supprimer cette souffrance il se sent obligé de choisir l’un des deux pôles. Mais ce n’est pas seulement pour supprimer sa souffrance c’est aussi parce que la réalité concrète, la vie lui impose de faire un choix. Nous ne pouvons pas éternellement remettre le choix à plus tard car cela reviendrait à faire le choix de l’immobilité. Pour avancer dans la vie, pour vivre nous devons choisir. Très souvent ce choix n’est pas conscient. Il est le résultat de notre histoire, de nos conditionnements.

Cette question du choix impossible entre deux solutions qui semblent opposées revient régulièrement chez l’individu qui cherche à être lui-même. Elle s’exprime dans les rêves qui, souvent, dans un premier temps semblent vouloir nous faire vivre, ressentir, les deux opposés alternativement afin de trouver une solution, non envisagée au préalable, dans laquelle nous ressentons les deux opposés comme des complémentaires.

Vivre le conflit, même très intensément, ce qui veut dire vivre, accepter la souffrance qu’il génère pour aboutir à une solution apaisée qui n’est pas le refoulement de l’un des deux choix mais une sorte d’union à un autre niveau. Le refoulement de l’un des deux est une solution qui semble soulager au début mais plus tard (ou très vite) le conflit réapparaitra encore plus fortement ou s’exprimera dans le corps car refoulement n’est pas suppression. Dans la nature rien ne disparait, tout se transforme.

Nous sommes dans une période très tourmentée où les opposés s’affrontent. Sur beaucoup de sujets nous sommes sommés de prendre parti pour un camp ou pour l’autre. Ami ou ennemi. Rien d’autre. C’est la « guerre ». L’individu dans ce qu’il est de plus intime, de plus profond, ne peut s’exprimer dans cette dualité. Cette ambiance nauséabonde crée la peur, affaiblit la conscience, le moi, et le laisse fragile face à des forces inconscientes qui s’expriment de plus en plus au grand jour. Le moi faible est plus enclin à choisir l’un des deux camps parce qu’il n’a pas la force de résister. Pour être tranquille… En faisant cela il choisit la guerre.

Les rêves sont nombreux à aborder cette question de l’affrontement des opposés et et de la façon d’en sortir. En voici quelques-uns.

Rêve – Une prison light pour hommes

Dans une prison light pour hommes. Je me promène dans un couloir en me dirigeant vers le centre de la prison. Là, au cœur, je rencontre des femmes pleines de vie. Elles ne sont pas impressionnées ni par les hommes ni par la prison. La prison n’est plus un problème pour elles car elles ont créé une oasis de vie dans son centre.

Voici les premiers commentaires de la rêveuse peu de temps après l’arrivée de ce rêve :

 » J’ai l’impression d’avoir atteint une source de vie, là où les opposés s’apaisent… L’impression d’aller vers ma personnalité profonde. Les hommes obéissaient à certaines règles assez froides mais cette manière d’être avait son utilité. Les hommes étaient à la périphérie, ils permettaient un rapport avec l’extérieur comme si les femmes ne pouvaient pas être directement en contact avec l’extérieur. Ce rêve est très fort. Il habite tout mon corps. »

Les opposés dont elle parle ce sont, en elle, le féminin et le masculin mais aussi l’intérieur et l’extérieur. Ces notions de féminin et masculin sont très délicates à aborder. Chacun, y compris celui qui écrit ces lignes, y met ce qu’il est, ce qu’il a vécu. On pourrait les remplacer par les mots orientaux de Yin et Yang mais la difficulté serait encore plus grande car ces mots ne font pas parti de notre culture, de notre vécu. Ce ne sont que des coquilles vides que notre intellect peut remplir avec n’importe quoi c’est-à-dire en répétant ce qu’il a entendu ou lu. Il y a un lien très important entre la notion de féminin et les femmes en général tout comme il y a un lien important entre la notion de masculin et les hommes en général. Mais il y a du féminin et du masculin chez les femmes et chez les hommes. Par ailleurs une personne peut paraître très féminine dans son aspect extérieur et se comporter ou penser d’une façon très masculine et inversement. ( voir Féminin – Masculin vers l’harmonie et suivants).

Pendant longtemps les rêves de cette femme insistaient sur le fait qu’elle devait s’intéresser à sa partie féminine pour que celle-ci s’exprime plus. Inconsciemment elle en avait déduit qu’elle devait freiner en elle son côté masculin. Puis un jour un rêve lui a fait comprendre que développer son côté féminin ce n’était pas s’empêcher d’être masculine. Dans ce rêve de prison nous pouvons constater que ces deux orientations féminin – masculin ne sont pas opposées mais complémentaires. Chacune a sa place. C’est parce que les hommes sont là avec leurs règles froides, c’est-à-dire appliquées automatiquement, que le féminin peut totalement s’exprimer  en créant de la vie. Notons néanmoins que cette prison est une prison light (En Anglais : léger ou lumière). Les règles appliquées par les hommes ne sont probablement pas aussi froides que ce que dit la rêveuse. Il y a de la légèreté dans leur application, de la détente… du féminin.

Au moment du rêve la rêveuse avait une vie personnelle difficile qui était rendue d’autant plus difficile par les mesures gouvernementales concernant la situation sanitaire. Comme beaucoup de gens elle se heurtait à des contraintes extérieures mais aussi à cette ambiance nauséabonde générale qui l’empêchaient de vivre, de s’exprimer. Elle se sentait comme dans une prison à ciel ouvert. Le rêve vient lui montrer que cette prison peut devenir une protection si par l’intermédiaire de ses attitudes masculines elle entre en contact (d’une façon light) avec cet extérieur menaçant. Cette protection du masculin pourra permettre à sa féminité de s’exprimer, de se développer en toute sécurité. Il faut noter que son moi, qui représente sa partie consciente, est parti de la périphérie et va vers le centre. Il (c’est-à-dire la rêveuse) est donc capable de partir des contraintes extérieures, de s’adapter par un masculin léger pour découvrir au cœur l’oasis féminin. Nous pouvons supposer qu’elle pourra également faire le chemin inverse.

Si nous essayons de regarder l’image du rêve que voyons-nous? Cette prison pour homme à la forme ronde ou carrée avec au centre une petite forme ronde ou carrée représentant l’oasis des femmes. C’est l’image d’un mandala. Ce mandala est utilisé en Orient pour favoriser l’intériorité, la méditation en profondeur. il est aujourd’hui très connu chez les occidentaux. Le fait de faire un mandala ou de le contempler nous met dans un état de sérénité, crée de l’ordre en nous. Jung a repris ce nom Hindou pour désigner cette structure symbolique qui dans les rêves représente la totalité de ce que nous sommes, comme il a repris le mot Soi (cf Glossaire) pour désigner notre centre. Dans ce rêve le Soi est représenté par ce lieu central, vivant où s’expriment les femmes. Il est « au cœur ». Il est le centre mais aussi le siège de l’amour. Il n’est donc pas étonnant que la rêveuse ait la sensation forte que le rêve habite tout son corps.

cropped-mandala12.jpeg

 

Rêve – Pass sanitaire obligatoire à la bibliothèque.

Je dois renouveler mon abonnement à la bibliothèque. Je pourrai le faire en ligne mais je tiens à me déplacer. En  ce moment, je n’ai plus le droit d’emprunter des livres car je n’ai pas le pass. Pour moi c’est l’occasion d’avoir un contact avec le personnel. J’arrive à la bibliothèque, je demande à renouveler mon abonnement. J’explique que c’est pour utiliser les offres en ligne car je n’ai pas le pass. La personne me dit de regarder les livres. Je suis étonnée et lui redis que je n’ai pas le pass. Elle me répond qu’emprunter des livres dans une bibliothèque est essentiel sinon à quoi servent les bibliothécaires? Pour  mon histoire de pass elle s’en arrange ; Cela ne semble pas être un problème.

En ressortant je ressens l’importance d’avoir été dans le lieu. Je pensais vraiment que je ne pouvais plus avoir accès aux bibliothèques. Je n’ai pas  vu d’informations officielles sur l’accessibilité possible. C’était peut-être pour que je prenne conscience que la situation est très difficile mais que ce n’est pas aussi bloqué que ce je crois.

Ce rêve semble très proche de la réalité que vit la rêveuse. La tentation serait grande pour elle de penser qu’il ne fait que répéter la réalité extérieure qu’elle est en train de vivre dans cette période dans laquelle beaucoup de situations, d’habitudes ordinaires, nécessaires à la vie, sont interdites aux personnes n’ayant pas le pass sanitaire c’est-à-dire, pour le dire plus concrètement aux personnes qui ne sont pas vaccinées contre le covid 19. Qu’il ne fait que répéter la réalité extérieure en montrant qu’elle va s’améliorer. Rêve prémonitoire? (voir Rêves prémonitoires )

La rêveuse considère que pour défendre la vie, la sienne et celle des autres, dans sa situation personnelle elle se doit de ne pas être vaccinée. En conséquence sa vie est attaquée par les restrictions qui lui sont imposées. Sa situation est très paradoxale. Elle est prise entre ces deux opposés que sont  » se faire vacciner » ou « ne pas se faire vacciner ». Elle a fait son choix mais elle le supporte mal, elle supporte mal ses conséquences. Elle supporte mal également que d’autres personnes aient fait le choix contraire, elle les considère comme responsables de ces mesures « inadmissibles » que le gouvernement ne pourrait imposer si beaucoup plus de personnes les refusaient. Par ailleurs parmi les personnes vaccinées beaucoup semblent considérer que le virus n’aurait plus d’effets si les non vaccinés acceptaient de se faire vacciner… Nous sommes dans le conflit des opposés, dans la dualité.

Intérieurement, psychologiquement, nous projetons une partie inconsciente de nous-mêmes sur les personnes qui ont fait l’autre choix. Si la guerre est déclenchée ce qui semblait être le cas de la rêveuse, nous nous coupons d’une partie de nous-mêmes.

Que dit la rêveuse?

  » Dans le rêve je ne m’attendais pas à que cela se passe aussi bien, à ce que je rencontre une personne aussi compréhensive. Après je me suis sentie en recul. Une impression de légèreté. Je n’étais plus envahie par cette question du Pass. »

Elle n’était plus dans la guerre contre les autres, guerre en elle-même. Cet état était le résultat du rêve.

Mais dans la réalité extérieure il lui fallait renouveler son abonnement. Quelques jours après son rêve elle se présenta à la bibliothèque. L’entrée lui était interdite par un agent de sécurité. Elle parlementa, plaida sa cause. Peut-être pour s’en débarrasser car elle ne lâchait pas il lui conseilla de faire le tour de la bibliothèque. Après avoir frappé à une fenêtre puis une porte elle réussit à rencontrer une bibliothécaire. Elle ne fut pas autorisée à entrer mais pu renouveler son abonnement et avoir une conversation avec cette employée qui était tout à fait d’accord avec elle mais appliquait les ordres de ses supérieurs pour ne pas perdre son travail.

La rêveuse raconte :  » Quand je suis partie à la bibliothèque je ressentais mon rêve. Sans ce rêve je n’y serais pas allée. Je me sentais très concernée, très déterminée. Ce que j’avais à faire était juste. Mais je n’étais pas envahie par la colère, j’étais profondément détendue. »

Rêve – Calmer l’extrême droite.

J’étais avec d’autres qui avaient une tendance à aller vers l’extrême droite. J’essayais d’orienter leurs décisions pour qu’ils n’y aillent pas. Je faisais attention qu’ils ne s’aperçoivent pas que je n’étais pas des leurs.

Dans Wikipédia : « Le qualificatif « extrême droite » peut être utilisé de manière stigmatisante et péjorative par ses adversaires politiques en assimilant toutes ses tendances au fascisme et au nazisme. … en France, le terme n’est quasiment jamais assumé par ceux qui en font partie,… » Ce qualificatif est aussi associé aux mots patriotisme, nationalisme, traditionalisme, antisystème, xénophobie, racisme. Le mot « extrême » renvoie aux termes de radicalisation, autoritarisme, totalitarisme…

En fait pour une majorité de gens l’extrême droite c’est vraiment le pire, le mal. A une autre époque nous aurions parlé du diable qu’il faut repousser, combattre à tout prix. Je dirais : le diable qu’il faut refouler à tout prix.

Pour un rêveur qui n’est pas familiarisé avec l’inconscient ce genre de rêve met très mal à l’aise. Je me souviens d’une personne Iranaise réfugiée en France qui avait été torturée dans les geôles de son pays et qui avait rêvé à l’Ayatollah Khomeini. Elle était horrifiée.

Le rêveur de ce rêve sur l’extrême droite n’est pas trop déstabilisé car il a l’habitude de chercher la signification symbolique des rêves. Ce n’est quand même pas très réjouissant car le rêve lui dit qu’en lui il y a des forces représentées par des personnages d’extrême droite et qu’il les fréquente sachant que dans la réalité extérieure il fréquente des personnes de gauche voire d’extrême gauche. Nous sommes en présence du conflit entre les opposés que sont d’un côté la gauche voire l’extrême gauche et de l’autre l’extrême droite. Plus précisément, ces personnages d’extrême droite peuvent représenter en lui un extrémisme qui peut apparaître parfois dans ses pensées, ses actes. Un façon de rester droit dans ses bottes, d’être totalitaire dans ses convictions, fermé à l’écoute de l’autre (l’étranger en lui). C’est cela que lui montre le rêve par ses fréquentations. Mais il montre également que le rêveur commence à prendre conscience de ces attitudes et qu’il essaye de les atténuer avec beaucoup de douceur et de patience pour ne pas déclencher la guerre avec elles. On pourrait dire qu’il prend conscience de son refoulement.

La guerre entre les opposés. Comment s’en sortir?

Évidemment cette question ne s’adresse pas à ceux qui sont pris dans cette guerre et ils sont nombreux. Ce qui ne veut pas dire qu’un jour, après de nombreuses batailles extérieures, intérieures, ils ne verront pas les choses autrement. Tant que nous rejetons la responsabilité de nos problèmes sur les autres (projection) il n’y a pas d’issue. Pour les autres, ceux qui se la posent, ils auront compris à la lecture de ces rêves qu’il est possible de s’en sortir. Si patiemment nous sommes à l’écoute de notre inconscient, de ce que nous sommes, de nos ombres, les solutions viendront d’elles-mêmes. 

Il n’y a pas de solution automatique. La solution individuelle à un moment donné est le résultat d’une conscience aigüe de ce que sont réellement les deux opposés et également d’une transformation du moi conscient et de l’inconscient. 

S’il fallait néanmoins s’appuyer sur une solution générale ce serait, qu’après s’être imprégné de la nature des deux opposés, faire son choix et s’y tenir, tout en sachant que l’opposé non choisi contient également une part de vérité. Cela ne veut pas dire qu’un jour si les conditions ont changé nous ne ferions pas l’autre choix.

Le film  » Les Robins des pauvres » peut être une belle illustration, très actuelle, du conflit des opposés que sont  » faire le bien » ou « appliquer la loi ».

Fichier PDF de cet article