« Il n’y a qu’un seul chemin et c’est votre chemin » C.G. Jung dans « Le livre rouge »

 » Le livre rouge »  est un livre de C.G. Jung qui a été publié longtemps après sa mort. De son vivant il n’a pas souhaité le publier car il craignait qu’il ne soit pas ou mal compris. Seuls quelques proches avaient pu en avoir connaissance.

Ce livre composé de textes, peintures – mandalas, illustrations… est inspiré. Il est directement issu de l’inconscient par des visions, des imaginations actives… C’est un livre poétique, prophétique qui est le résultat de sa confrontation directe avec l’inconscient. Il n’est pas rationnel comme l’est toute son œuvre qu’il a voulu scientifique. Néanmoins et aussi grâce à cela il exprime des vérités profondes. En voici un petit extrait (page 231)  :

    Mes amis : Ce n’est pas une doctrine, pas un enseignement que je vous donne. D’où tirerais-je le droit de vous donner des leçons ? Je vous révèle le chemin de cet être humain, son chemin mais pas votre chemin. Mon chemin n’est pas votre chemin ; Je ne peux donc pas vous instruire. Le chemin est en nous, mais pas dans les dieux, ni dans les doctrines, ni dans les lois. C’est en nous qu’est le chemin, la vérité et la vie.

    Malheur à ceux qui vivent selon des modèles ! La vie n’est pas avec eux. Si vous vivez selon un modèle, vous vivez la vie d’un modèle, mais qui vivra votre vie sinon vous-mêmes ? Donc vivez vous-mêmes.

    Les panneaux indicateurs sont tombés, des sentiers incertains se déroulent devant nous. Ne soyez pas avides d’avaler les fruits qui se trouvent dans le champ des autres. Ne savez-vous pas que vous êtes le champ fertile qui porte tout ce qui vous est utile ?

    Mais qui le sait aujourd’hui ? Qui connaît le chemin qui mène aux champs éternellement fertiles de l’âme ? Vous cherchez le chemin par le biais d’éléments extérieurs ; vous lisez des livres et écoutez des avis : à quoi bon ?  

    Il n’y a qu’un seul chemin et c’est votre chemin.

    Vous cherchez le chemin ? Je vous mets en garde contre mon chemin. Il peut être pour vous le mauvais chemin.

    Que chacun suivre son propre chemin.

    Je ne veux être pour vous ni un sauveur, ni un législateur, ni un éducateur. Allons, vous n’êtes plus des enfants.

    Légiférer, vouloir améliorer, faciliter est devenu une erreur et un mal. Que chacun cherche son propre chemin. Le chemin conduit à un amour réciproque dans la communauté. Les hommes verront et ressentiront la ressemblance et le caractère commun de leurs chemins.

   … La violence suscite la violence, le mépris suscite le mépris, l’amour suscite l’amour. Donnez la dignité à l’humanité et soyez confiants que la vie trouvera le meilleur chemin.

   … soyez patients avec ce monde estropié et ne surestimez pas sa beauté parfaite.

Le chemin dont il est question ici est ce que Jung a appelé par ailleurs le chemin de l’individuation c’est-à-dire le chemin de vie, personnel à chacun, qui nous emmène vers ce que nous sommes profondément. Ce chemin se découvre pas à pas en vivant tout simplement. Il est souvent inconscient, chaotique. Il n’est pas rare que des personnes regrettent des actions ou orientations qu’elles ont prises dans leur vie sans se rendre compte que c’est ce bout de chemin passé qui les a conduit vers ce qu’elles sont et  pensent aujourd’hui.

Ce chemin est individuel. Il ne peut-être copié sur celui des autres. Le livre rouge est une expression du chemin individuel de Jung ce qui explique pourquoi il n’a pas décidé de le publier. Néanmoins il a beaucoup travaillé à le mettre en forme  pour une publication éventuelle au moins dans un cercle restreint. Il serait ridicule de prendre ce qu’il écrit à la lettre et de rejeter totalement son chemin ou celui d’autres. Nous serions des « enfants » qui suivent un « sauveur » ou « législateur » ou  « éducateur », qui dans leur toute puissance, auraient découvert la vérité à s’imposer et à imposer aux autres. Notre chemin se construit aussi en découvrant celui des autres tout en sachant qu’il n’est pas le nôtre. Voici quelques rêves qui montrent comment se découvre, se construit notre chemin.

Rêve – J’avance pas à pas dans le brouillard

La rêveuse est dans une ville qu’elle ne connaît pas. C’est une ville à la fois ancienne et nouvelle. Il y a un brouillard intense, elle est perdue. Elle ne sait pas où aller et avance pas à pas.

Nous avons tellement besoin de sécurité, nous avons tellement peur du futur que nous planifions en permanence le chemin que nous voulons prendre. Cette façon de faire est nécessaire pour tout ce qui concerne le concret, l’extérieur. Il faut une planification pour construire une maison, créer les fondations avant le toit… Mais cette démarche n’est pas du tout bonne en ce qui concerne notre intériorité. La difficulté est que l’intérieur et l’extérieur tout en étant séparés sont très imbriqués. Quand le moi va trop loin dans cette démarche de prévision, de planification, l’inconscient vient compenser notre attitude en nous faisant perdre tous nos repaires. En général ce n’est pas facile à accepter et la tentation est grande de trouver rapidement les moyens de sortir de cette « dépression ».

Ce rêve est l’expression d’une « dépression ». La rêveuse ne connaît pas le lieu où elle se trouve, elle est perdue et ne sait pas où aller dans ce brouillard intense. Néanmoins elle n’est pas complètement tétanisée, elle avance pas à pas. Elle fait ce qu’elle peut, humblement avec ses moyens. C’est ce que nous sommes obligés de faire quand la vie nous met dans des difficultés insurmontables sauf à refuser la réalité, toujours et toujours, ou à abandonner la vie. Son rêve lui donne une indication importante sur son état. Elle est dans une ville qu’elle ne connaît pas. Il y a donc du changement en elle et elle (son moi) va devoir s’y adapter. Ce changement n’est pas complètement radical. Il s’appuie sur son passé. La ville est à la fois ancienne et nouvelle.

Rêve – Chemin obscur, elle suivait l’homme

La rêveuse se voyait sur un chemin obscur, marchant dans la boue. Elle suivait un homme dont elle ne distinguait que le pan de sa cape noire. A chaque pas que l’homme faisait, il laissait, dans la boue, une trace en forme de croissant. La clarté de la lune la faisait briller. La rêveuse devait veiller à mettre ses pas dans les traces ainsi rendues visibles.

Ce rêve est extrait du livre QUAND LE RÊVE DESSINE UN CHEMIN page 253   Étienne Perrot  aux Éditions de La Fontaine de Pierre

Nous retrouvons la désorientation du rêve précédent mais ici la rêveuse a plus de repères pour découvrir son chemin. Le repère principal c’est cet homme qui la précède et qu’elle suit pas à pas en mettant ses pas dans les traces de l’homme. Cet homme est ici son homme intérieur ou son inconscient masculin. Il est son guide car étant dans l’inconscient, dans le noir, le sombre il sait se diriger. Pour voir les traces des pas de l’homme elle est aidée par la lumière de la lune, cette lune qui est évoquée aussi par la forme du croissant. Ce n’est pas la lumière conquérante du soleil qui correspondrait mieux à la démarche rationnelle du conscient mais une lumière douce qui éclaire dans la nuit inconsciente .

Je voudrais vous alerter sur la tentation courante qui serait de plaquer l’interprétation de ce rêve sur d’autres rêves analogues ou sur des situations de la vie extérieure. L’interprétation d’un rêve est aussi un chemin unique au rêve, à la personne concernée et au moment où elle l’a rêvé. Il ne faudrait surtout pas en déduire que tous les hommes qui apparaissent dans les rêves de femmes sont des guides. Ils le sont potentiellement dans la mesure où ils sont des parties inconscientes en elles (des ombres) qu’elles doivent apprendre à connaître, à reconnaître mais pas obligatoirement à suivre.

Une erreur courante est également de confondre l’intérieur et l’extérieur et pas seulement quand il est question de rêves. Il ne faudrait surtout pas en déduire que la femme doit suivre l’homme dans le domaine de la réalité extérieure comme il ne faut pas en déduire que l’homme doit suivre la femme.

Pour un rêveur le guide sera plutôt sa femme intérieure comme Ariane dans la mythologie grecque. Avec son aide, son amoureux Thésée pourra pénétrer au centre du labyrinthe afin de tuer le monstre, le Minotaure, puis retrouver le chemin de la sortie avec le fameux fil d’Ariane.

Voici un rêve de labyrinthe.

Rêve – L’hôpital psychiatrique a la forme d’un labyrinthe

Un hôpital psychiatrique qui a la forme d’un labyrinthe. Comment sortir de là? La rêveuse trouve une belle porte blanche avec un liseré bleu ciel. Malheureusement il y a derrière une grille qui empêche le passage. La rêveuse a réussi à passer. Elle découvre deux hommes dont l’un est artiste. Ils sont dans leur atelier. Ils ne font rien, s’ennuient, n’ont pas le moral. La rêveuse les fait rire. L’artiste se met à faire le pantin en jouant. Ils deviennent gais. Ils vont sortir tous les trois.

L’hôpital psychiatrique est un lieu de soin pour les personnes dont la santé mentale est fragile. C’est un lieu fermé qui est sécurisant pour ces personnes. Il les protège de l’extérieur qu’elles ressentent comme menaçant. Pour des personnes non fragiles ou moins fragiles il peut devenir une prison. En général il ne peut être qu’un lieu transitoire. Ici l’hôpital psychiatrique a la forme d’un labyrinthe. Le labyrinthe est un symbole très proche de l’hôpital psychiatrique. Il peut être vu comme un lieu de soin dans la mesure où c’est une aide pour trouver un chemin qui nous emmène vers notre profondeur, notre centre (Soi). Il est utilisé ou a été utilisé dans de nombreuses traditions spirituelles par exemple en Inde dans certains temples ou à la cathédrale de Chartres. Mais il faut pouvoir en sortir sinon il devient une prison.

La rêveuse (son moi) est perdue dans ce labyrinthe qui représente son inconscient. Son premier réflexe pour trouver la sortie est d’utiliser sa conscience lumineuse, cette belle porte blanche mais cela ne fonctionne pas car derrière il y a une grille. Elle a réussi à passer nous ne savons pas comment, ni elle d’ailleurs. Elle a probablement laissé tomber sa conscience lumineuse, sa volonté, pour se laisser guider par son intuition ou ce qu’on nomme le hasard. Et là elle découvre ces deux hommes qui dépriment. Cela explique que dans la réalité extérieure elle se sentait dans cet état. Ils s’ennuyaient  car elle ne s’intéressait pas à eux. Sa présence a réveillé l’artiste endormi en elle comme le prince charmant a libéré la belle  dans le conte de la belle au bois dormant. Et cette libération, comme par miracle, leur permettra à tous les trois de trouver la sortie. C’est bien dans une sensation de libération qu’elle s’est réveillée après ce rêve.

Les rêves exprimant la recherche de notre chemin sont nombreux. Vous en aurez un nouvel exemple en lisant le Rêve – La trottinette un moyen pour atteindre la Jérusalem céleste dans l’article « L’amour est-il impossible? »

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Ma relation avec l’inconscient

Pour comprendre la différence entre le Moi et l’Inconscient il faudrait avoir lu le Préambule jusqu’au rêve de l’ours.

Il est toujours difficile d’accepter, de comprendre que l’inconscient (également ses parties) réagit comme une personne. Il est autonome comme peut l’être mon moi que je ressens quand je dis « moi je… ». Il réagit comme une autre personne que je connaîtrais vaguement, comme un étranger. Mais en même temps j’ai l’impression qu’il fait aussi partie de moi d’où la difficulté. Quand il m’envoie un message très désagréable sous forme de rêve cela me touche énormément mais très vite je vais me protéger en refusant sa réalité. « Ouf. Ce n’est qu’un rêve » ou j’en parle en plaisantant. Je supprime sa réalité, la réalité de cet étranger, de son message. Qu’il retourne dans son pays!

Nous deux (Moi , l’inconscient) nous avons grand intérêt à être en relation même si ce n’est pas facile car nous sommes tellement différents. Moi je suis structuré autour de ce qu’on appelle le rationnel et lui c’est l’irrationnel. Si je refuse cette relation, si je bâtis un mur entre nous, je dépense énormément d’énergie ce qui  m’affaiblit, me fatigue. Lui aussi a besoin de moi, il a besoin que je le reconnaisse, le considère, le respecte. Si ce n’est pas le cas il va accumuler des forces patiemment, en attendant le moment propice, le moment de ma faiblesse pour m’attaquer avec sauvagerie. Ce sera d’autant plus sauvage qu’il aura attendu longtemps. Cette attaque peut prendre de nombreuses formes : Un burn out, un accident, une maladie…

C’est vital pour moi de le fréquenter régulièrement parce qu’il est mon origine (ma mère), mon réservoir d’énergie, mes racines. Que fait un arbre sans racines très puissantes? Il s’envole à la moindre tempête et meurt ou reste estropié. Cette fréquentation ne veut pas dire que je dois tout accepter de lui. Face à lui je dois être moi-même si nécessaire avec vigueur mais ne pas fermer la porte.

Voici deux rêves qui montrent une relation positive entre le moi du rêveur et l’inconscient

Rêve – La friche cultivée par d’autres
J’habite dans une maison entourée d’un terrain dans lequel je jardine régulièrement. Au delà de ce terrain il y a une très grande friche dont je ne perçois pas de frontière. Elle semble être à moi tout en n’étant pas à moi. C’est bizarre…

Je m’aperçois que dans cette friche il y a des parties qui ont été cultivées par d’autres, beaucoup d’autres. Je suis émerveillé et très heureux de cette découverte. Je vais amplifier cela en trouvant d’autres personnes qui pourraient faire la même chose sur des endroits qui sont encore en friche.

Ce rêve utilise le symbole du jardinage ce qui est assez courant. Le jardinier travaille la terre, sa terre intérieure quand il a une démarche de s’intéresser à ce qu’il est. S’il s’y prend correctement il pourra obtenir des fruits, des légumes, une nourriture qui lui permettra de vivre en puisant dans son réservoir d’énergie, la nature en lui, sa nature inconsciente. Mais ce n’est pas lui seul qui fait pousser les fruits, les légumes. Ils poussent naturellement grâce au sol, au soleil, à la pluie, aux saisons… à ce que nous nommons la nature. Le jardinier doit rester humble. Il ne fait qu’accompagner le travail de la nature. Cet accompagnement est important mais il ne suffit pas. Si le jardinier prend la grosse tête, s’il croit pouvoir se passer de la nature par toutes sortes de techniques, d’artifices (engrais, pesticides, cultures hors sol…) cela marchera un certain nombres d’années mais la qualité des fruits et légumes va se dégrader (le sol, l’air également) et ils ne pourront plus le nourrir. Le jardinier doit rester humble et toujours se poser la question de la limite de son action. Qu’est-ce que je fais et quelle place je laisse à la nature? Je ne dois pas prendre sa place sinon je me sens un dieu tout puissant alors qu’en réalité je ne suis qu’un apprenti sorcier. Nous devons nous poser la même question dans un travail intérieur (que ce soit par les rêves ou autre). Qu’est-ce que je fais et quelle place je laisse à ma nature inconsciente?

A propos de la friche dont il ne perçoit pas la frontière, le rêveur dit « Elle semble être à moi tout en n’étant pas à moi. C’est bizarre… » Cette perception exprime bien que cette friche représente son inconscient. Sa maison et le jardin qui l’entoure représentent son moi. C’est là où il se sent chez lui où il peut décider de jardiner en faisant des efforts conscients pour évoluer dans le sens qui lui paraît souhaitable. Son moi est aussi la nature en lui mais une nature consciente. Au delà c’est la friche inconsciente.

Il découvre que des parties de la friche ont été cultivées par d’autres. Il n’y a pas que le moi qui évolue, l’inconscient également. Cette évolution est le résultat du travail d’autres c’est-à-dire de ses ombres inconscientes. On pourrait penser que cette évolution de l’inconscient s’est faite seule sans lien avec le moi. On pourrait également faire l’hypothèse qu’elle est une conséquence du travail du moi. La découverte de cette évolution est une conscience du moi qui s’élargit. Il est émerveillé, heureux. Cette sensation évoque la découverte de la Jérusalem céleste dans le rêve – La trottinette un moyen pour atteindre la Jérusalem céleste (voir l’article « L’amour est-il impossible? »). Le moi souhaite amplifier le jardinage de la friche en s’adressant à d’autres personnes, en se rapprochant d’autres ombres en lui. Il a compris qu’il ne peut pas le faire lui-même.

Voici maintenant le rêve d’une femme.

Rêve – Je découvrais la maison à côté de la mienne
J’étais en train de marcher dans un lotissement. Au début du rêve il me semblait que je ne connaissais pas ce lotissement. Puis je me rends compte que c’est celui où j’habite. J’ai l’impression d’être à la fois chez moi et en même temps très loin.

Un fourgon aménagé descend dans la rue et s’arrête à ma hauteur. Le couple qui est à l’intérieur cherche une maison. Ils savent qu’elle est dans la rue mais ont oublié l’adresse exacte. Ils me disent qu’il s’agit d’une maison simple, de plein pied avec beaucoup de fenêtres, de portes ouvertes. Elle est entourée d’un jardin très nature avec beaucoup d’arbres comme à la campagne. Ils ajoutent que cette maison est très différente des autres qui elles sont très cossues. Deux femmes vivent là avec des enfants. Je ne vois pas. Je suis désolée de ne pas pouvoir les renseigner.

Au moment où le fourgon repart je les arrête car d’un seul coup cela est devenu une évidence pour moi. La mémoire me revient comme si j’étais quelqu’un d’autre. En fait la maison est juste à côté de la mienne. En descendant la rue je les accompagne. Le couple est très content. Ils me disent qu’une des deux femmes vient de mourir en laissant une petite fille. Heureusement qu’il y a l’autre femme. Je leur montre la maison que je trouve très attirante. Je me rends compte que jusqu’ici je n’avais pas prêté attention à elle. Comment était-ce possible?

Maintenant je ressens le besoin de me préoccuper de ce qui se passe dans cette maison. J’aperçois la petite fille qui court dans le jardin. Elle rit, elle est pieds nus, cheveux longs et porte une robe blanche assez longue. Elle semble très à l’aise, en contact avec la nature. Elle est avec un homme jeune qui s’en occupe très bien. Il y a une proximité entre eux deux.

Je suis rassurée. Cet homme s’occupera bien d’elle.

Dans ce rêve nous retrouvons la perception de l’inconscient qui est une partie importante de notre personnalité. Il est représenté par le lotissement car  » Au début du rêve il me semblait que je ne connaissais pas ce lotissement. Puis je me rends compte que c’est celui où j’habite. J’ai l’impression d’être à la fois chez moi et en même temps très loin. » Il est également représenté par cette maison qui est juste à côté de celle de la rêveuse et qu’elle ne voyait pas, ne connaissait pas. Pour la découvrir, la redécouvrir, il lui a fallu retrouver la mémoire, une mémoire cachée en elle « comme si elle était quelqu’un d’autre ». Il faut noter que cette prise de conscience a été suscitée par l’arrivée et le questionnement de ce couple qu’elle ne connaît pas, ce couple étranger pour elle.

Comme dans le rêve précédent elle est émerveillée et heureuse de sa découverte. Elle est très attirée par cette maison et cette petite fille qui toutes les deux respirent la nature, l’ouverture, la vie. Elle a très envie de s’impliquer dans cette découverte.

La petite fille représente une nouvelle énergie féminine, une énergie plus proche de la nature inconsciente, plus libre de tous les conditionnements. Elle représente l’esprit d’enfance, la naïveté de l’enfant qui s’émerveille devant le nouveau sans réserve, sans idées préconçues. 

Pourquoi le départ de la mère de la petite fille et l’arrivée de cet homme jeune qui rassure la rêveuse? Pour répondre à cette question il faut connaître le contexte du rêve c’est-à-dire la personnalité de la rêveuse, sa vie au moment du rêve. C’est une femme que l’on peut dire très féminine au sens où elle est intuitive, très à l’écoute des autres, très à l’écoute de son intériorité, de son inconscient. L’inconscient qui comme souvent cherche à compenser l’attitude consciente, l’emmène vers des attitudes que l’on peut qualifier de masculines : une intégration plus grande à la réalité extérieure, un développement de la pensée dirigée, ordonnée. D’où l’arrivée de cet homme en elle qui est jeune car c’est assez récent pour elle. Pour cela il a fallu qu’une femme meure car il y avait peut-être trop de féminin. Il y avait peut-être trop d’un certain type de féminin, un féminin adapté à la société, consensuel. Cet homme va permettre que se développe ce que représente la petite fille : Un féminin très pur, très nature, rebelle.

Nous remarquons ici, ce qu’on peut discerner souvent dans les rêves à propos du lien entre ce qu’on appelle le féminin (ou attitudes dites féminines) et le masculin   ( ou attitudes dites masculines). Ce sont deux opposés qui  s’excluent. Ici l’homme apparaît parce que la femme est partie. Et en même temps ils sont intimement, inconsciemment liés. Ici l’homme est nécessaire pour le développement de la petite fille. Les attitudes masculines sont nécessaires à cette rêveuse pour qu’elle soit pleinement elle même, pleinement femme. (voir également ACCUEIL DES RÊVES à partir de Marginalité – Conformisme )

A propos des rêves qui montrent une relation conflictuelle entre le moi du rêveur et l’inconscient

Ils sont très nombreux. Le lecteur en trouvera facilement dans ses propres rêves. Ce sont tous les rêves désagréables, les cauchemars. Ils sont d’une importance capitale car ils montrent les conflits à l’œuvre. Ils sont chaque fois des occasions de prise de conscience qui permettront d’aller vers plus d’harmonie à condition que nous ne cherchions pas à nous en débarrasser.

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L’amour est-il impossible?

L’amour impossible semble avoir toujours existé chez l’être humain (occidental?). La littérature s’est très souvent emparée de ce thème qui est un mythe depuis  la nuit des temps. Pour ne citer qu’un seul exemple prenons  « Roméo et Juliette » popularisé par la tragédie de William Shakespeare. Roméo et Juliette tombent éperdument amoureux l’un de l’autre. Ils veulent se marier mais découvrent qu’ils appartiennent à deux familles qui se haïssent depuis longtemps sans que l’on sache pourquoi. Ils feront tout leur possible pour réaliser ce mariage mais leurs efforts n’aboutiront qu’à la mort de chacun.

De nos jours ce mythe est toujours à l’œuvre. Un coup de foudre, un sentiment d’amour très puissant qui rencontre une impossibilité de pouvoir le vivre, l’incarner dans la vie concrète par une vie commune, une relation physique… Les raisons de cette impossibilité peuvent être nombreuses. L’amour n’est pas réciproque, l’autre est engagé avec quelqu’un et ne souhaite pas se désengager…, l’autre est libre mais ne souhaite pas s’engager…les deux sont amoureux mais il y a néanmoins impossibilité… etc etc.

Qu’est-ce que ce sentiment d’amour qui nous possède, nous transforme radicalement au point de nous faire ressentir que la vie est belle, pleine, que tout est possible, que nous pouvons quitter notre vie quotidienne actuelle qui paraît grise à côté de cet espace de liberté qui s’ouvre devant nous? Le changement en nous est tellement rapide, fort. Nous nous ressentons comme possédé par cet état dans lequel le raisonnable n’a plus de place ce qui s’apparente à de la magie. C’est pourquoi dans les mythes, dans la littérature, il est souvent question de filtres d’amour. Cupidon,  le dieu de l’amour, nous a envoyé sa flèche. Cet état d’amour dans lequel nous sommes plongé ne semble pas dépendre de notre volonté c’est pourquoi nous pouvons le nommer amour divin. Dans la suite de cet article j’utiliserai souvent cette expression « amour divin » pour exprimer cet amour magique qui est ressenti comme très réel par l’amoureux mais qui s’apparente à un mirage pour son l’entourage.

C’est un sentiment de plénitude, d’harmonie, une sécurité. Nous ne sommes plus seul, nous avons rejoint notre moitié. Il est dit couramment : « Il (ou elle) l’a dans la peau ». Notre moitié, c’est cette partie en nous que nous pressentons mais que nous ne connaissons pas, c’est la partie noire de l’œuf dans le rêve de l’œuf, c’est notre partie inconsciente. C’est ce sentiment de plénitude que nous recherchons toute notre vie sans nous en apercevoir et pas seulement quand nous tombons amoureux d’une autre personne. C’est cette recherche de l’unité en nous  qui nous donne envie de vivre, qui nous donne le désir de vivre, de vivre intensément. C’est un retour au paradis perdu, la Jérusalem céleste que nous connaissions dans l’inconscience avant notre naissance, la naissance de notre moi. Cette unité Jung l’a appelée le Soi.

Nous verrons plus loin que ce sentiment de plénitude ne dure pas ou s’il dure qu’il est accompagné de beaucoup de difficultés, de beaucoup de souffrances. Par exemple pour la femme de Tchaïkovski (cf le film de Kirill Serebrennikov ).  Mais avant, voyons un rêve qui montre un chemin vers cette harmonie, vers cet amour divin. 

Rêve – La trottinette un moyen pour atteindre la Jérusalem céleste

Je suis en vacances chez Geneviève. Sa maison est dans un lotissement. Elle me propose une ballade en trottinette. Elle fonce devant. La route monte beaucoup. J’ai du mal à la suivre. Je force mais un genou me fait mal. Je trouve qu’elle exagère d’aller aussi vite. Je décide d’aller à mon rythme. Je me sens mieux. A un moment la route se sépare en deux. J’hésite puis prend à droite. Plus loin la route débouche sur un train à l’arrêt. Pour continuer je suis obligée de monter dans le train. Une jeune noire en uniforme exprime son agacement. « Ce n’est pas normal que les gens passent par le train pour continuer la route! » A ma demande, elle m’accompagne pour aller vers la sortie. Me voilà en haut des escaliers de la gare. Je lui souhaite une bonne journée. Elle esquisse un sourire.  Je descends les escaliers.

A la sortie de la gare je me retrouve en face d’une ville. Je ne m’y attendais pas. C’est une ville très ancienne, magnifique. J’entre par un porche. Les constructions sont très belles. Il y a des sculptures sur les bâtiments. Malgré les rues très étroites il y a une belle lumière rouge. J’aperçois un dôme de mosquée. Il y a une vie intense, beaucoup de gens marchent dans les rues. Je croise des femmes bras dessus bras dessous. Toutes sortes de femmes, certaines portent le voile d’autres sont habillées en moderne. Il me semble les connaître. Je décide de ne pas retourner chez Geneviève. Je trouverai un logement ici sans problème.

À son réveil la rêveuse s’est trouvée dans un état de légèreté, de bien être, de paix. La conclusion de ce rêve est la découverte de cette ville. Les caractéristiques de ce lieu sont la beauté, le côté éternel, vivant, harmonieux (ville ancienne en lien avec le profond, le religieux. Religieux signifie : être relié). En elle (cette ville ou la rêveuse) des parties opposées (femmes voilées, femmes modernes) s’unissent. C’est le lieu de l’amour, cet amour qui est aussi évoqué par la couleur rouge.

Pour découvrir ce lieu il lui a fallu parcourir (ou découvrir) tout un chemin. Tout d’abord être en vacances c’est-à-dire être en ouverture sans avoir d’objectif précis. Le chemin s’est découvert peu à peu en avançant. La trottinette est un moyen individuel  de déplacement très proche de la marche mais avec un aspect de jeu, un parfum d’enfance, une curiosité, une ouverture à ce qui se présente, un appel à la vie. Au début elle a suivi Geneviève, une amie d’enfance, qui avait cette ouverture. Elle était aussi une jeune très sportive trop sportive pour la rêveuse. La découverte du chemin nécessite une ouverture, un accueil et aussi beaucoup d’effort.  Mais pas trop. Il faut savoir doser son effort et ne pas toujours suivre les autres, les méthodes (cf l’article  » Les clefs pour se maîtriser ou la rencontre avec ses ombres ? » ). C’est ce que fait la rêveuse en s’adaptant à son propre rythme tout en laissant partir Geneviève. S’adapter à son propre rythme c’est s’engager. C’est par exemple décider dans le choix de la direction qu’elle fait après avoir hésité.  Par la suite elle tombe sur un obstacle ( le train ) qu’elle décide de franchir malgré la mauvaise humeur de la contrôleuse. Cet épisode évoque dans les contes ou mythes  les nombreuses épreuves auxquelles les femmes sont soumises pour avancer sur leur chemin ( Par exemple :  Cendrillon. Psyché . Dans ces deux contes la magie est très présente). Puis comme par enchantement elle découvrira ce lieu mythique, cette Jérusalem céleste où la rêveuse va s’installer.

Que dit-elle sur ce rêve? 

Spontanément elle fait le lien entre son rêve et un film qu’elle a vu la veille. Il retraçait la vie d’un danseur-chorégraphe reconnu mondialement dans le monde de la danse sans être connu du grand public en France. Elle a été fascinée par ce danseur au point de faire de nombreuses recherches pour mieux le connaître. Les informations qu’elle a trouvées étaient pratiquement toutes en anglais. Elle, qui ne maîtrise pas beaucoup l’anglais, a dû faire de gros efforts pour décortiquer et comprendre ces textes.

Que dit-elle de cet homme?

C’est quelqu’un qui sent ce qu’il a à faire. Il a toujours su le sens profond de sa vie, vers quoi il devait aller. Il vient d’un milieu pauvre. Il parle de ce que ses deux parents lui ont transmis. Dans cette pauvreté, cette dureté de la vie, il fallait faire des efforts, être déterminé et en même temps ils avaient le respect des autres. Il a beaucoup de succès, il est adulé dans les plus hautes sphères mais il sait que cela n’a qu’un temps. Après, ce qui restera, ce sont ses amis, sa famille, les liens profonds avec ses proches. Il est un dieu pour beaucoup mais lui reconnait ses faiblesses. Il sent quand il est trop pris par les fastes internationales et qu’il doit retourner à son travail de danse au quotidien avec des gens simples dans son pays.

C’est un homme qui me convient bien. Il a une énergie…

A la question : Est-ce qu’une femme aurait pu t’attirer à ce point? Elle répond:

Une femme ne pourrait pas être dans cette énergie là. C’est un homme qui parle de sa nature profonde. C’est plus fort que si c’était une femme car chez une femme cette expression est naturelle. C’est un homme qui a une allure très masculine mais c’est un danseur. Il y a beaucoup de féminité en lui. Il travaille très souvent avec des femmes. Il est très complet. En regardant le film, en pensant à lui j’ai ressenti une plénitude. C’était la même sensation, la même énergie que mes efforts avec la trottinette dans le rêve. J’ai ressenti une même identité entre ces efforts que j’ai fait dans le rêve et les efforts que cet homme a fait et continue à faire dans sa vie pour être en lien avec ce qu’il est profondément.

Cette plénitude, ce sentiment d’amour dans la découverte de la ville mythique,  la rêveuse les associe à  la découverte de cet homme. Quelle est cette magie qui a pu rendre cela possible? C. G. Jung l’a appelée la projection.  En découvrant cet homme, sans en être consciente, la rêveuse a reconnu  une partie d’elle même que l’on peut nommer son homme intérieur. Celui-ci lui paraît être sa moitié non connue, son inconscient. Cette rencontre a crée l’union en elle d’où cette sensation de plénitude, d’amour (amour divin).

Chez cette femme il n’y a pas eu le besoin que cet amour s’incarne dans la vie concrète par une vie commune, une relation physique… Elle a pris conscience de la projection ce qui lui a permis d’échapper aux effets du filtre d’amour. La rencontre de cet homme par le film et les éléments de sa biographie deviennent un moyen pour elle d’entrer en contact avec son homme intérieur, son inconscient et d’accéder à une plénitude sans qu’elle soit accompagnée de la souffrance de l’amour humain impossible. Son attitude fait songer aux muses qui sont les inspiratrices des artistes, des écrivains. L’évocation  de la muse favorise leur créativité.

Dans l’amour nous n’avons vu pour l’instant que l’amour de notre ami(e) intérieur (e) (amour divin) qui est accompagné d’une acceptation assez facile de l’impossibilité de l’amour humain avec la personne sur laquelle  nous projetons l’amour divin. Mais ce n’est pas la généralité. Très souvent l’être amoureux a besoin que cet amour s’incarne dans sa vie concrète, extérieure par une relation avec l’être aimé. L’impossibilité n’est pas vue ou pas acceptée et cela engendre une très grande souffrance qui peut durer longtemps. Suffisamment longtemps pour que la personne ressente, prenne conscience que son état d’amour provient de l’intérieur d’elle-même et qu’il n’est pas totalement lié à la personne aimée. Il semble que ce soit l’acceptation de la souffrance sans rejet de la personne aimée qui permette cette prise de conscience. Si cette prise de conscience ne commence pas à se faire, un jour  la projection peut se déplacer sur une autre personne et le même processus peut continuer à être à l’œuvre si  l’amour humain avec la nouvelle personne est encore impossible.

L’amour impossible est donc une chance (comme toutes les difficultés qui nous arrivent dans la vie!) pour aller vers plus de conscience plus de compréhension de son propre fonctionnement. Mais il n’est pas envisageable de le dire à la personne qui vit cela car elle est prise dans les filets du filtre magique ( ou dit d’une autre façon : dans la projection ). Plus tard cela sera  possible quand elle commencera à se libérer de ces filets.

Voici comment cette prise de conscience est apparue, concrètement,  chez un homme vivant un amour impossible. Pendant assez longtemps il a vécu à la fois dans la souffrance de cette impossibilité et dans cette sensation de plénitude quand il pensait à l’être aimé. Un jour il reçu un mail d’une femme qu’il connaissait un peu. En lisant ce mail il eut la  même sensation de plénitude qu’il avait quand il recevait des mails de la femme qu’il aimait. C’était assez troublant. Cette expérience s’est reproduite avec d’autres femmes. Le jour où il vécu la même expérience en lisant un mail de sa sœur il compris que l’amour était en lui et qu’il dépendait peu de la personne extérieure.  Un peu néanmoins puisque cela ne se produisait pas avec toutes les femmes.  

Bien entendu il n’y a pas que des amours impossibles. En occident la rencontre se fait souvent à partir de la projection, de cette sensation de plénitude en présence de l’être aimé. Puis il y a le désir de vivre cet amour concrètement par une vie commune. Cette vie commune permet de rencontrer l’autre d’une autre façon. Non pas à travers une image intérieure mais concrètement de le connaître, l’aimer pour ce qu’il est (amour humain). C’est un long apprentissage car l’image intérieure est souvent toujours là ce qui permet au désir d’être ensemble de persister en attendant que l’amour humain s’installe durablement. Mais l’existence de ces deux types d’amour crée beaucoup de confusions et de souffrances. Souvent l’autre ne réagit pas comme on voudrait, comme on croyait qu’il réagirait. Il ne correspond pas à l’image que nous avons de lui. Cela nous exaspère jusqu’au jour où l’on comprend qu’il est comme il est et que vouloir lui imposer des attitudes c’est nier son individualité c’est se couper de la richesse qu’il représente car il est différent de nous. Nous retrouvons ici la même prise de conscience qui peut apparaître dans le cas d’un amour impossible.

Dans la projection il y a sensation d’identité entre l’être aimé et l’ami(e) intérieur(e). Mais dans la réalité l’être extérieur ne correspond qu’à un aspect de l’être intérieur. C’est pourquoi on peut être amoureux de plusieurs personnes à la fois. Et contrairement à notre désir nous ne trouverons jamais la personne extérieure qui correspond en tout point à l’ami(e) intérieur(e). Et c’est tant mieux car si c’était le cas la personne extérieure deviendrait une sorte de dieu pour l’amoureux, celui-ci devenant complètement à la merci de l’être aimé avec toutes les dérives possibles. C’est ce qui se passe sur un temps limité dans l’amour fou et aussi dans la soumission au Gourou dans certaines sectes.

En résumé il y a dans l’amour deux amours. Le premier est souvent déclencheur. C’est l’amour divin qui est un amour d’une partie de soi-même donc un amour de soi. Si cet amour est fort l’amoureux est possédé et il cherche à posséder l’être aimé. Le deuxième est plus serein c’est l’amour humain, le véritable amour de la personne aimée. Ces deux amours sont souvent présents dans une relation mais pour que chacun y trouve son compte, que l’amoureux  n’empêche pas le développement personnel de celui qu’il aime, il faut qu’une conscience se développe sur l’existence de ces deux amours (divin – humain) qui ne sont pas sur le même plan.

Ces deux amours sont bien séparés à l’aide de deux personnages dans le très beau film « Edmond« . C’est aussi le cas dans le mythe « Tristan et Iseut » où l’amour divin se porte sur Iseut la blonde aux cheveux d’or et l’amour humain sur Iseut aux blanches mains. Pour lire un résumé de ce mythe c’est ici.

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La mort dans les rêves

Je rêve de ma mort ou de celle d’un proche

Sa mort ou celle de ses proches interpelle très souvent le rêveur même si le rêve n’est pas accompagné de peurs ou d’une ambiance de cauchemar. Au réveil il se pose rapidement la question : Est-ce que cela va arriver ? Est-ce un rêve prémonitoire ?

Il y a toujours deux interprétations possibles concernant les personnages ou situations d’un rêve (voir Quelques repères pour comprendre un rêve).

Soit ils représentent les personnes physiques que l’on connaît, les situations extérieures. C’est ce qui vient en premier à l’esprit.  Je vais prochainement mourir ou cette personne va mourir. C’est assez rare. Cela arrive dans les cas où le rêveur est très intuitif  ou qu’il a un lien très fort avec la personne. Mais les intuitifs savent que leurs intuitions ne se réalisent pas toujours. En attendant de voir si la réalité viendra confirmer l’intuition il est plus sage de s’intéresser à l’autre type d’interprétation.

Soit ils représentent des parties subjectives de nous-mêmes qui sont en train de mourir. Cela signifie des changements en nous, des évolutions, transformations. Nous avons intérêt à nous demander ce qu’elles représentent pour pourvoir accompagner consciemment ce processus.

La personne qui m’a raconté le rêve suivant est une femme qui était adolescente au moment du rêve. Elle dit que ce rêve l’a beaucoup marquée.

Rêve – Elle assiste à son enterrement

Elle est dans un cercueil. C’est son enterrement. Elle est aussi devant le cercueil. Elle assiste donc à son enterrement. A coté d’elle sa mère est effondrée, en larmes.

Elle se voit dans le cercueil pendant son enterrement. Elle est donc morte tout en étant consciente de cette mort. C’est contradictoire avec notre peur de la mort car en général la mort est pour nous la mort du corps mais aussi celle de la conscience.  Mais son corps est également bien vivant car elle est devant le cercueil et l’accompagne. Le rêve la montre dans deux états différents. Dans le premier son corps est mort, dans le deuxième il est vivant. Dans les deux cas la conscience est encore là.

Comment comprendre ce rêve? De quelle mort il s’agit? Pour nous aider nous avons deux informations. La première est dans le rêve: « sa mère est effondrée, en larmes ». La deuxième est dans la vie de la rêveuse. Elle était dans la période d’adolescence ce qui veut dire que se posait pour elle la question de partir de sa maison familiale concrètement mais aussi psychologiquement. Pour vivre sa vie elle devait prendre du recul, s’éloigner du conditionnement familial, de sa mère. Ce changement d’état, cette évolution ne se fait pas sans souffrance même si elle n’est pas consciente. Cette souffrance est vécue par la mère qui a du mal à laisser partir sa fille. Cette mère est la mère extérieure qu’elle connait mais aussi une mère intérieure, une entité psychologique en elle qui est représentée par sa mère car elle réagit de la même façon. Le rêve montre donc la mort de l’enfant (ou de l’adolescente) en elle.

Rêve – Elle est tuée mais encore là

Dans une grande pièce vide, lumineuse, la rêveuse est là, seule. 3 personnes entrent (2 femmes et un homme). Ils veulent la tuer. Elle n’a pas de moyen pour se défendre. Elle se met à prier Dieu et à s’en remettre à lui. Il semble qu’elle ait été tuée mais en se faisant cette réflexion elle s’aperçoit qu’elle est encore vivante.

Dans ce rêve il y a une mort suivie de la vie qui est toujours là. Ici le changement, l’évolution, la transformation ont été créés par la prière. S’en remettre à Dieu c’est, symboliquement, accepter notre petitesse, c’est abandonner notre désir d’agir, reconnaître que notre pouvoir a des limites. C’est aussi lâcher prise comme dans le rêve de l’ours .

Ce rêve est arrivé à un moment où la rêveuse se sentait de plus en plus elle même, où elle se sentait revivre après une période difficile. De quelle mort s’agit-il ? Pour le savoir il faudrait connaître d’autres rêves avant celui-ci ou après. Les rêves ne sont pas toujours isolés. Il faut pouvoir les remettre dans le contexte de la vie de la rêveuse mais aussi les relier à d’autres rêves de la même époque. Dans un rêve précédent la rêveuse était à son travail. Son chef de service lui imposait en permanence de rendre des comptes ce qui la contraignait et l’empêchait de vivre. On peut considérer que cette mort en elle  est celle de l’attitude de ce chef de service. C’est cette extrême exigence qu’elle avait envers elle, ce besoin d’être irréprochable. La mort de cette attitude a été possible par son lâcher prise. Cette attitude exigeante peut être reliée également à « la grande pièce vide lumineuse ». La lumière ici représente le besoin extrême de comprendre, de maîtriser. Pour lâcher prise il faut pouvoir accepter le brouillard, la nuit, la mort.

Rêve – Je me suis battu avec mon frère… Il est mort

Je me suis battu avec mon frère. (Il ressemble à mon ancien chef). Si j’avais pu je lui aurais mis mon poing dans la gueule. La prochaine fois ou dès que je peux je le ferai. Je vais en parler à mes parents pour qu’ils soient au courant avant que cela se fasse. Par la suite j’apprends qu’il est mort. Il a été tué. Ce n’est pas moi qui l’ai tué mais il y a peut-être un lien.

Dans la réalité le rêveur n’a pas de frère. Ce frère représente donc une partie de lui-même (une ombre) qui lui est très proche c’est-à-dire proche de sa conscience. Une sorte de frère ennemi. Le rêveur ne le supporte pas. Il semble vouloir l’éloigner, s’en débarrasser mais pas jusqu’à le tuer car il fait parti de sa famille, de sa structure. Cette structure, représentée par ses parents, il veut l’avertir du conflit, peut-être du changement imminent car cela sera dur à supporter pour elle, pour lui.

Que représente en lui cette ombre? Elle ressemble à son ancien chef. Celui-ci était très différent du rêveur ou plutôt de comment le rêveur se perçoit, de l’image qu’il présente aux autres. D’après lui, ce chef était autoritaire, cassant, ne se préoccupant pas des autres ce qui semble être le contraire du rêveur. Il faut signaler au passage que cette description évoque au rêveur la personnalité de son père.

La mort de cette ombre en lui est donc une évolution très importante. Il semble l’avoir souhaitée tout en la redoutant.

Je rêve d’une personne qui en réalité est morte

Nous avons toujours la possibilité des deux interprétations :

Soit la personne morte est une partie intérieure du rêveur. C’est assez compréhensible dans des rêves où la personne décédée se comporte très différemment du comportement qu’elle avait quand elle était vivante (sauf à faire l’hypothèse que l’esprit du mort peut évoluer après sa mort physique). Le rêveur du rêve précédent a souvent rêvé à son père décédé. Il présentait la même image, le même visage mais avait des comportements très éloignés de ceux du mort.

Soit … Il y a des rêves où nous avons la sensation que le mort ou son esprit vient nous visiter, souvent pour nous transmettre une connaissance à laquelle il a accès. Est-ce vraiment le mort qui revient ou plutôt une partie de nous même qui est très éloignée de la conscience? Cette question est-elle vraiment importante? Il me semble que, quelle que soit la réponse, le rêve nous donne accès à une réalité qui est très profondément enfouie dans l’inconscient. L’important pour nous est de l’assimiler.

Rêve – Ma grand mère vient de mourir

La grand mère qui était très proche d’une jeune femme venait de mourir. Elle vient la voir dans un rêve pour lui dire:  » Ne t’inquiète pas. Je vais très bien là où je suis « .

Quelle que soit l’interprétation que l’on puisse faire, l’esprit de la personne décédée ou un esprit intérieur, l’important est de prendre le rêve au sérieux, comme tous les rêves d’ailleurs,  et que l’interprétation ne soit pas une façon de fuir sa réalité. C’est une réalité psychique qui a autant d’importance qu’une réalité physique. Si on le prend au sérieux il agira. Dans le cas présent il aidera la rêveuse à accepter cette réalité inéluctable qui est la mort physique de sa grand mère. 

Voici maintenant une vision. Une vision est une sorte de rêve éveillé qui nous saisit beaucoup plus fortement qu’un rêve. La vision et le texte qui l’accompagne est une citation de Alberte Michon-Rajon  qui a été une proche d’Étienne et Francine Perrot.

Vision – Le seau de larmes

Une histoire m’est revenue en mémoire après avoir reçu le coup de fil d’une personne angoissée qui venait de perdre un être cher. Elle avait des visions et, autour d’elle, des manifestations bizarres se produisaient. Elle ne savait que faire.

Je vous rapporte cette histoire parce qu’elle pourra aider quelques personnes dans la peine après la perte d’un être cher comme elle a aidé une de mes amies qui était déprimée après la mort de sa mère dont elle était très proche. Le grand vide laissé par son départ faisait qu’elle ne parvenait pas à sortir de son chagrin et pleurait chaque jour.

Or elle rencontra à ce moment-là une personne perdue de vue depuis assez longtemps – une personne simple – qui lui raconta une histoire qu’elle avait vécue quand elle était enfant. Elle avait perdu une petite sœur de deux ou trois ans. Le chagrin de sa mère était immense. Elle ne parvenait pas à surmonter sa peine et vivait sans cesse en pensée avec son enfant mort, négligeant complètement son mari et ses autres enfants et toutes les personnes de son entourage.

Un jour, qu’elle était assise près de sa mère sur un banc, elle vit celle-ci changer d’expression, fixer quelque chose et prononcer des mots inaudibles. La fillette, était un peu effrayée, sentant qu’il se passait quelque chose qu’elle ne voyait pas et ne comprenait pas. Elle secoua sa mère en l’appelant, comme pour la réveiller. Alors sa mère lui dit : « Je viens de voir ta sœur. J’ai d’abord vu une belle dame qui conduisait un groupe d’enfants joyeux et, un peu en arrière, ayant des difficultés à suivre la joyeuse bande, il y avait ta petite sœur qui portait un grand seau plein d’eau et qui peinait beaucoup. Je lui ai dit : « Cette charge est bien trop lourde pour toi, que portes-tu donc ? » et elle m’a répondu : « Arrête, maman de pleurer : ce sont tes larmes que je porte. »

La mère est sortie de cette vision apaisée. Elle a presque arrêté de pleurer à partir de ce moment. Elle a compris qu’il ne fallait pas essayer de retenir ceux que l’on aimait et qu’il fallait accepter l’incompréhensible.

La femme qui a raconté la vision de sa mère à mon amie n’avait rien oublié, bien que cela soit arrivé il y a bien longtemps, quand elle était petite fille, alors qu’elle a maintenant plus de soixante ans.

Ce que montre cette vision est valable aussi pour les vivants. Il nous faut laisser aller ceux que l’on aime vers leur destin, ne pas les peiner par nos larmes, notre souffrance et notre sentiment d’abandon.

 

 Que disent les rêves de la mort?

Rêve – juste avant  de mourir

Il y a quelques années, un homme âgé qui était très malade depuis longtemps était à l’hôpital toujours allongé dans son lit car il ne pouvait plus se lever. Il en avait assez de souffrir et avait peur de mourir.

Un matin l’infirmière vient le voir et le trouve très gai, très heureux, détendu ce qui n’était pas son état habituel. 

Il lui dit qu’il a fait un rêve. Il était debout dans la salle de bain attenant à sa chambre. Il venait de se laver et était entrain de s’habiller. Il était guéri.

Ils ont plaisanté en parlant de ce rêve puis l’infirmière est allée chercher quelque chose dans la salle de bain. Quand elle est revenue quelques minutes plus tard il était mort.

On pourrait considérer que la finalité de ce rêve était d’aider le rêveur à lâcher prise, à le rassurer, à accepter sa mort.  C’est le côté compensatoire des rêves. Ils montrent une autre perception de la réalité. 

Mais le rêve pouvait très bien dire également que le rêveur était guéri. Guéri de ses peurs, de sa souffrance, des contraintes de son corps.

Pour aller plus loin dans la réponse à cette question : Que disent les rêves de la mort?  je vous conseille de lire le livre de Marie-Louise von Franz « les rêves et la mort » aux éditions La Fontaine de Pierre.

Voici un extrait de sa conclusion :

Les rêves de personnes confrontées à la mort montrent tous que l’inconscient, c’est-à-dire notre monde instinctif, ne prépare pas la conscience à une fin totale, mais bien plutôt à une profonde transformation et donc à un mode de continuation du processus vital que notre conscience ordinaire ne nous permet pas de saisir. Les thèmes et les structures des symboles qui apparaissent dans les rêves correspondent aux doctrines des différentes religions sur la vie après la mort, et nous y avons retrouvé un très grand nombre d’images mythiques.

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Mouvement des gilets jaunes ou la rencontre avec ses ombres

Pour comprendre cet article il faut avoir lu les articles  » Accepter nos faiblesses, nos handicaps » et « Les clefs pour se maîtriser ou la rencontre avec ses ombres ? »

Il pourrait paraître surprenant de trouver un article concernant un mouvement de protestation sur un site dont l’objectif est la sensibilisation à la compréhension des rêves. Il n’y a pas d’erreur. C’est tout à fait dans l’objectif d’un site qui s’appelle les rêves et la vie. En effet, comme je l’écrivais dans l’article précédent, par nos rêves l’inconscient agit très souvent en compensation d’un moi conscient trop orienté. L’intérêt d’un travail à partir de ses rêves est donc d’enrichir notre moi conscient souvent trop unilatéral (pour ne pas dire trop extrême) par une compréhension plus vaste de notre vie et un comportement en accord avec cette nouvelle compréhension.  Ce travail doit donc être en lien avec notre vie quotidienne sinon on risque de s’envoler vers un monde de chimère, de fuir notre réalité d’humain ce qui est très souvent la tentation.  Et notre vie quotidienne qui dépend en partie de ce que nous sommes et de ce que nous faisons est aussi complètement imbriquée et dépendante des pensées et actions collectives de la société dans laquelle nous vivons. 

Mais revenons à cette notion d’ombre. Les ombres, ce sont ces parties inconscientes que nous ne pouvons ou ne voulons pas voir. Parties souvent rejetées parce qu’elles dérangent l’orientation du moi conscient. Elles peuvent être considérées comme l’inconscient dans son ensemble. Elles sont représentées par tous les personnages du rêve (sauf le rêveur qui représente le moi) mais les plus problématiques sont celles qui nous font peur, celles que nous fuyons, que nous rejetons.  Ce sont les brigands de toutes sortes qui souvent nous agressent, nous volent. Ils représentent souvent nos faiblesses, nos incapacités. Dans les rêves ils sont :

les marginaux (voir Marginalité – Conformisme ), les manouches (voir Les clefs pour se maîtriser ou la rencontre avec ses ombres ? ), …

les personnes en situation de handicap (physique, mental) (voir Accepter nos faiblesses, nos handicaps)…

les personnes sans domicile fixe, les migrants sans papiers…

les personnes pauvres, de milieux défavorisés, exclues…

Et aussi les femmes représentant le féminin en nous (pour les hommes mais aussi pour les femmes). Le féminin qui est plus proche de l’inconscient inquiète, insécurise le masculin, le moi conscient qui, pour se protéger, cherche à le maîtriser. Ce  désir de maîtrise peut s’exprimer de différentes façons par exemple à certaines époques dans la chasse aux sorcières.

Pour se construire, se stabiliser, la vie veut que le moi se protège en refusant toutes ces ombres sinon il risque d’être envahi, de ne pas pouvoir se structurer et même de disparaître (physiquement ou dans des maladies mentales extrêmes).  Il se protège donc en refusant des entités qui auraient pu faire partie de lui mais qui pour l’instant sont trop difficiles à intégrer. Par la suite quand il a atteint un état d’équilibre, de stabilité, il a du mal à prendre le risque d’être déstabilisé bien qu’il sente en lui le besoin de s’ouvrir, de s’enrichir au contact de l’autre en lui. Ses mécanismes de défenses continuent à fonctionner  et il est pris dans un conflit entre la fermeture sur lui-même et l’ouverture (voir Nos peurs, nos résistances). S’il choisit la fermeture d’une façon continue  il va se scléroser, rester sur ses vérités pour garder son assurance (Moi je…). Une fausse assurance qu’il aura besoin de renforcer à chaque attaque extérieure, à chaque attaque  des ombres, de l’inconscient, car celui-ci, en compensation, cherchera de plus en plus à l’ouvrir au fur et à mesure qu’il se protégera. L’issue peut être dramatique pour la personnalité. Maladies, accidents…

Et le mouvement des gilets jaunes dans tout cela? Et bien nous en parlons depuis le début de cet article. Si nous considérons ce mouvement comme faisant parti d’un rêve, d’un conte ou d’un mythe il exprime la réaction des ombres, de l’inconscient face à un moi sclérosé dans ses attitudes. Ce moi c’est la conscience du pays formée des décideurs de tout niveau représentés par le gouvernement actuel avec à sa tête le président et également par une grande partie de la population qui se cramponne à sa façon de vivre actuelle bien qu’elle ressente le besoin urgent de changement. En définitive on pourrait dire que ce sont les personnes reconnues dans la société.

Les gilets jaunes sont la frange de la population la plus pauvre,  si on écarte de plus pauvres encore qui n’ont plus les moyens physiques de réagir. Ces derniers « réagissent » également mais par des moyens qui se retournent contre eux-mêmes, contre leur intégrité physique et/ou mentale. C’est par l’usure des corps, les maladies, les drogues de toutes sortes, la soumission aux exigences des administrations, l’abandon du désir d’être soi-même pour pouvoir être aidés, pour recevoir les miettes qui permettent de vivoter. Le moi qui se drape dans sa toute puissance dirait que ce sont des assistés.

Les gilets jaunes se révoltent contre des injustices qui durent depuis trop longtemps et qui empirent avec le gouvernement actuel. Ils réagissent sans avoir de programme défini comme le fait l’inconscient. Ils sont actuellement l’expression de l’inconscient de notre pays. Leur première réaction est de vouloir bloquer le pays comme le fait l’inconscient sur le corps avec les burn out, maladies ou accidents. Trop c’est trop.

Au départ ils n’ont pas vraiment de revendication. Ils se révoltent car ils n’en peuvent plus devant un moi qui les ignore, les maltraite, qui ne s’intéresse qu’à une petite partie de la population, qui est incapable de comprendre l’autre partie, de s’intéresser à elle. Pendant longtemps il a fait semblant pour avoir la paix mais ses actes sont trop contraires à ses paroles. Pour avoir cette paix il lui faudrait accepter d’évoluer , de se remettre profondément en question. Mais peut-il encore le faire?

Leur première revendication est symbolique. Ils réclament le départ du président, du roi. Il y a quelques mois certains avaient même pendu et brulé un mannequin à l’effigie du président. 

Dans de nombreuses sociétés primitives, la prospérité du pays tout entier dépendait de la santé physique et psychique du roi : si celui-ci devenait impuissant ou tombait malade, il fallait le tuer et le remplacer par un autre dont la santé et la puissance sexuelle garantissaient la fécondité des femmes et du bétail et la fertilité de la terre… dans certains cas, la coutume n’était pas d’attendre que le roi vieillisse : passé un certain nombre d’années, il était mis à mort. L’intention est la même que précédemment : il se trouve périodiquement épuisé et doit être remplacé. … Marie Louise von Franz dans « l’interprétation des contes de fées » Édition Albin Michel  page 69.

La plupart du temps on ne tuait pas le roi mais il était remplacé.

L’ancien monde doit être détruit pour être renouvelé. Cet ancien monde, ce sont nos façons de penser et d’agir qui aboutissent à tant d’injustice sociale, et de destructions du milieu naturel nécessaire à la vie sur terre. Et pour cela l’inconscient réagit de pleins de façons. En particulier par ce mouvement des gilets jaunes (d’autres l’ont précédé), par les catastrophes climatiques qui deviennent de plus en plus présentes…

Comment réagit le moi à ces attaques de l’inconscient? (Vous avez compris que dans cet article nous parlons à la fois du moi personnel d’un individu et du moi collectif du pays). Il semble avoir trop attendu pour prendre la mesure de la situation. Est-ce qu’il la comprend aujourd’hui? Son soucis n’est pas là. Il sent le danger et veut sauver sa peau à tout prix car changer profondément de politique n’est pas envisageable pour lui. Il n’est pas prêt au grand saut comme le Phénix qui accepte de mourir pour renaître de ses cendres.

Comment fait-il ce moi pour sauver sa peau?

Au début il est très gêné par ces témoignages poignants, ces situations dramatiques de personnes qui travaillent, n’arrivent pas à s’en sortir financièrement et qui s’en sortiront de moins en moins avec les réformes qui s’annoncent dont la taxe sur l’essence qui a été l’allumette qui a mis le feu aux poudres. Il y a beaucoup de femmes. On ressent dans ces témoignages la peur de tomber encore plus bas, au niveau des plus pauvres décrits plus haut qui ont abandonné le désir d’être soi-même, on pourrait dire le désir de vivre.

Il propose des mesurettes, des miettes, en trichant même dans les propositions comme cette soi-disant augmentation du SMIC qui n’en est pas une. Comme cela ne convainc pas grand monde il propose une grande consultation dans laquelle il pourra accepter des changements très minimes qui ne remettront pas en cause l’essentiel. Cette consultation permettra de faire durer les choses en comptant sur la fatigue des gilets jaunes. D’ailleurs il insiste sur le fait que le mouvement faibli, mais peu à peu la vérité ne peut être évitée. Les injustices, les colères sont trop fortes pour retomber aussitôt.

Alors il va chercher des raisons de dévaloriser ce mouvement. Il va chercher à casser son unité  car cette unité est très fragile. Elle ne tient que par la révolte.

Ils ne savent pas ce qu’ils veulent? Ils ne le savent que trop bien mais c’est tellement énorme que cela ne peut pas se décliner en une suite de revendications. C’est au moi à évoluer, à mettre en place consciemment les changements attendus, c’est son travail. Eux n’ont pas de temps pour cela. Ils doivent survivre au jour le jour.

Ils n’ont pas de représentants, ils ne sont pas organisés, ils ne sont pas raisonnables? Oui mais ce n’est pas leur fonction. Leur travail à eux c’est de faire pression sur le moi pour qu’il change. Et lui il les accuse d’être ce qu’ils sont, il leur demande d’être comme lui.

Ils sont violents, ils paralysent le pays, ils font peur? Oui comme souvent les brigands, les ombres dans les rêves, les cauchemars. Sils n’étaient pas violents ils auraient peu de chances d’être écoutés. Pour que cette violence fasse encore plus peur, pour l’amplifier, le moi demande aux « forces de l’ordre » d’être de plus en plus violentes en comptant sur la presse pour que cela ne ne voit pas trop. 

Comment cette situation peut-elle évoluer? Comme dans le cas d’un individu soit le moi intégrera suffisamment ces forces inconscientes qui sont une richesse pour l’ensemble de la personnalité, du pays, soit il continuera à se barricader derrière ses vérités, ses certitudes et  la réaction de l’inconscient sera, dans un futur plus ou moins proche, de plus en plus forte.

Mais me direz-vous, un mouvement extérieur comme celui des gilets jaunes ne fait pas parti d’un rêve, d’un mythe.

Voilà bien la réaction classique d’un moi conscient qui ne s’appuie que sur sa pensée logique! Avec le temps, le travail sur les rêves, la fréquentation de l’inconscient, nous aide à ressentir de plus en plus le lien entre ces deux mondes conscient et inconscient, à ressentir l’unité de la vie. Il n’est pas à exclure, si nous le ressentons, d’interpréter un évènement extérieur, personnel ou collectif, comme un rêve. Cela peut être riche d’enseignements.

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Les clefs pour se maîtriser ou la rencontre avec ses ombres ?

Les clefs pour se maîtriser.

Ce titre alléchant, qui envahit le domaine public, est très souvent bien loin des messages que peuvent nous apporter les rêves.

Il évoque que nous avons des comportements non souhaités par nous, notre entourage, la société, que nous voulons maîtriser comme le ferait un dompteur face à une bête sauvage. Ce dressage serait possible grâce à des clefs, des méthodes que nous pourrions appliquer à notre personnalité.

Nous serions une sorte de machine que nous pourrions déprogrammer puis reprogrammer à notre convenance comme on pourrait le faire pour des robots. Le monde marchand est de plus en plus friand de robots. Le robot représente l’homme idéal. Il peut travailler sans avoir ces comportements non souhaités qui freinent l’efficacité, la rentabilité. Cette exigence d’efficacité nécessite des robots très perfectionnés dont le comportement se rapproche de plus en plus de celui de l’homme par ce qui est nommé « l’intelligence artificielle ». Mais plus on fabrique des robots qui se rapprochent du comportement humain et plus on demande aux hommes d’être raisonnables, de nier leur côté irrationnel, d’être parfaits  c’est-à-dire de se comporter comme des robots.

Nier son côté irrationnel est totalement impossible pour l’homme car ce serait nier sa nature profonde. L’inconscient agit très souvent en compensation d’un moi conscient trop orienté. Si le moi, confiant dans son pouvoir sans limites, cherche à maîtriser l’inconscient d’une façon trop extrême, avec le temps, celui-ci aura des réactions également extrêmes dans l’autre sens. C’est ce qui s’est passé récemment chez deux hommes publics français qui ont une maîtrise d’eux-mêmes, un conscient puissant orienté vers la maîtrise des évènements extérieurs. Ils ont probablement eu des messages ou alertes de l’inconscient dont ils n’ont pas tenu compte. Cela s’est traduit par une alerte plus forte, un acte irrationnel, non maîtrisé par le conscient.  Cet évènement considéré comme une catastrophe, une carrière brisée, pourrait être s’ils en prennent conscience une occasion bénéfique de remise en question de leur fonctionnement. L’un était directeur du FMI et s’apprêtait à se présenter à l’élection présidentielle en France avec de grandes chances d’être élu. Il n’a pas pu se présenter. L’autre qui était le PDG d’une grande entreprise française s’est retrouvé emprisonné lors d’un passage au Japon.   

La rencontre avec ses ombres

L’inconscient ou plus précisément les ombres sont à l’origine de ces comportements non souhaités par le moi. Voici un rêve qui montre une attitude possible avec l’ombre. 

Rêve – La bagarre avec les Manouches

Je me trouvais chez mes parents, dans ma chambre. C’était le matin. En regardant par la fenêtre j’aperçus des manouches, un père et ses deux fils. Ils étaient en voiture et s’arrêtaient devant chaque maison pour y déposer des poubelles. Je sors alors de la maison pour interpeller l’un des deux garçons. C’est à peine s’il me regarde, me dévisage. Celui-ci vient voir le numéro de notre maison et me dit “ on se souviendra de cette adresse ”. Puis il commence à partir. Je le rappelle, le provoque et lui dit de venir se battre. Au départ il hésite puis nous nous battons (je me suis d’ailleurs réveillé avec une courbature sur la fesse gauche). A la fin de cet échange de coups nous sommes tous les deux un peu sonné. C’est comme si cela nous avait rapproché. Nous devenons alors amis. Nous allons faire du vélo sur le bord du canal Saint-Martin (près de Rennes, j’allais faire des ballades à vélo avec mes parents étant jeune)

Les manouches, les poubelles sont des parties inconscientes du rêveur qui est un jeune, un adolescent qui habite chez ses parents.

Les poubelles représentent tout ce que l’on rejette, tout ce qu’on ne sait pas assimiler, utiliser. Plus de conscience nous permettrait de voir qu’elles peuvent contenir des richesses que nous ne savons pas voir et que tout n’est pas à jeter.

Les manouches ont un style de vie très différent de la majorité de la population. Ils n’habitent pas un lieu fixe, voyagent beaucoup. Leur vie nous semble précaire mais beaucoup plus libre. Ils sont souvent rejetés.

Dans ce rêve, les poubelles déposées par les manouches devant chaque maison pourraient exprimer un juste retour à l’envoyeur. « Nous n’en voulons pas de vos déchets! » Par ce geste ils demandent au moi du rêveur de prendre conscience de toutes les ombres qu’il rejette (y compris les manouches eux-mêmes) et d’agir en conséquence. Le rêveur (son moi) n’accepte pas cette remise en question d’où la confrontation, la bagarre. Cette bagarre fait se rencontrer les deux ennemis qui deviennent amis. Devenir ami c’est se rendre compte que, bien qu’il soit différent, l’autre est tout aussi important que soi et qu’il est même complémentaire.

Ce rêve montre une évolution du rêveur qui ne s’est pas faite à partir d’un objectif d’évolution décidé par le moi conscient en appliquant une méthode pour y parvenir mais simplement en regardant en face une ombre (le jeune manouche), en acceptant la confrontation avec cette réalité intérieure.

Le manouche représente une liberté intérieure que le rêveur devait accepter pour aller vers la recherche de lui-même. Pourquoi n’acceptait-il pas cette liberté jusque là, pourquoi n’acceptons nous pas d’être libre, d’aller vers ce que nous sommes profondément? Parce aller vers ce que nous sommes c’est parfois, souvent, aller à contre courant de ce qu’on nous demande, de ce que nous impose la société, l’extérieur, que ce soit consciemment ou inconsciemment. Et aller à contre courant c’est devoir se battre contre les autres, contre soi-même (ses parties inconscientes) pour être accepté. Ce peut-être plus facile de se conformer à ce qui nous est demandé pour avoir la paix.

Ce rêve insiste sur le lien du rêveur avec ses parents. A la fin il va faire du vélo au bord du canal comme il le faisait plus jeune avec ses parents mais cette fois il y va en toute conscience en assumant sa nouvelle liberté (le manouche) qui l’autonomise par rapport à ses parents. Les parents ont été des tuteurs nécessaires un temps mais il vient un jour où il faut s’affranchir de ces tuteurs. Ces parents sont comme les clefs, les méthodes que nous recherchons pour avancer. Elles sont des tuteurs nécessaires à des moments de la vie mais il faut pouvoir s’en affranchir un jour sinon elles deviennent des carcans, des cuirasses qui,  guides et protectrices au début deviennent avec le temps des prisons.

Cette nécessité de confrontation avec l’ombre, avec l’inconscient, est la base du travail sur les rêves. On la trouve partout dans ce site. Par exemple dans le rêve de l’oursMarginalité – Conformisme,  ou l’article « Accepter nos faiblesses, nos handicaps » …

Voici une situation de vie qui m’est arrivée et qui aborde cette question de la recherche de clefs, de méthodes.

Peur de parler en public

J’étais embauché depuis peu dans une entreprise. On me demandait pour la première fois de faire la présentation d’un projet à une assemblée importante qui réunissait des responsables de services de toutes les régions de France. D’une façon générale je n’étais pas à l’aise pour parler en public. Par ailleurs je connaissais peu l’environnement dans lequel allait s’insérer ce projet probablement beaucoup moins que chacun des participants.

A l’approche du jour de l’intervention je commençais à être très tendu. Je m’imaginais ne plus pouvoir parler ou au moins avoir une voix très tremblante. Je voulais éviter cette situation à tout prix. A cette époque Je pratiquais beaucoup le yoga  où à longueur de séances on cherche à se centrer sur les sensations physiques, à être à l’écoute de son corps. Par ailleurs j’étais très imprégné par l’enseignement de Krishnamurti qui insiste sur l’importance de s’accepter tel que l’on est, d’accepter la réalité. Je décidais donc d’appliquer ces deux clefs. Me centrer sur mes sensations corporelles et accepter que j’allais bégayer ou ne plus pouvoir parler et que je ne pourrai pas l’empêcher. Cette résolution m’a apaisé un peu.

Le jour de l’intervention à la tribune, pendant les quelques mots de présentation du responsable de la réunion mon cœur s’est mis à battre fort, mes membres à trembler… Je me suis centré sur mes sensations corporelles en décidant d’accepter ce qui adviendrait. Au moment où j’ai pris la parole j’étais dans la réalité, une réalité concrète, physique. J’étais moi-même et j’ai parlé comme je l’aurais fait à un ami en face de moi.

Dans cette expérience je me suis accepté tel que j’étais avec mes ombres et celles-ci n’ont pas eu à se manifester puisqu’elles étaient acceptées. Cette acceptation a été possible parce que j’ai utilisé des clefs « pour me maîtriser ». Nous avons vu à l’aide du rêve sur les manouches que ce n’est pas toujours le cas. Une évolution intérieure est possible sans clef, sans méthode elle est beaucoup plus assurée, intégrée mais elle nécessite du temps, de la patience, un travail sur soi non orienté vers le résultat immédiat.

Les clefs, les méthodes peuvent être nécessaires. Il ne faut pas les refuser tout en sachant qu’elles sont comme des tuteurs, des béquilles et que notre destin est de marcher par nous-mêmes.

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Accepter nos faiblesses, nos handicaps

Nous sommes faits de la même matière, d’un assemblage des mêmes composantes. Mais chacun est unique. Nous avons des capacités qui sont différentes de celles de notre voisin. Nos incapacités, nos insuffisances, nos faiblesses elles aussi sont différentes de celles de notre voisin.

Pour nous insérer dans la vie nous devons nous appuyer sur des forces, des dons que nous choisissons de développer, d’exprimer. Ces choix sont orientés par les circonstances mais aussi par le milieu, la société dans laquelle nous évoluons.

En contrepartie nous ignorons nos parties faibles, nous les laissons en sommeil en évitant qu’elles apparaissent au grand jour, nous les rejetons. Quand les évènements extérieurs ou notre voisin les mettent en lumière ça fait mal.

Cette démarche est bien naturelle mais si elle dure trop longtemps, au delà du nécessaire, un manque se fait sentir. Nous fonctionnons qu’avec une partie de nous-mêmes. L’autre en nous, la faiblesse, réclame à être reconnue, acceptée, aimée. L’union de notre personnalité, notre totalité aspire à être vécue, à s’incarner.

Dans les contes de fées ces faiblesses non reconnues sont par exemple l’enfant trouvé ou le troisième fils d’un vieux roi qui est considéré comme simple d’esprit alors que ses frères sont vifs et intelligents. Ce vieux roi est faible et sent qu’il va mourir. Pour choisir lequel de ses trois fils héritera de son royaume il leur donne des épreuves  que le troisième fils réussit devant ses frères. Ainsi le simple d’esprit obtient la couronne, épouse la belle jeune fille rencontrée lors des épreuves et régnera avec sagesse pendant  de longues années.

Dans le rêve suivant ces faiblesses sont représentées par une personne.

Rêve – Le cours de natation

J’arrive au bord d’une piscine pour suivre un cours de natation animé par Marie. Je suis en retard. Ils ont déjà plongé et avancent sous l’eau jusqu’à l’autre bord. Puis ils restent un peu sous l’eau et remontent à la surface. J’ai plongé à leur suite. Pas facile d’avancer en restant sous l’eau. Au bout, en atteignant l’autre bord, j’ai essayé de rester sous l’eau sans respirer. A un moment j’ai senti que j’avais respiré mais l’eau n’était pas entrée en moi.

L’eau est un symbole de l’inconscient, de l’irrationnel,  des eaux primordiales d’où nous venons, de notre mère nature. En naissant sur la terre s’est développé notre moi rationnel qui est nécessaire pour survivre. Mais l’inconscient en nous reste très important et difficilement abordable par le moi (cf « Préambule »  voir « l’inconscient et moi » et « l’accueil des rêves »).

Dans ce rêve le rêveur (son moi conscient) est en formation pour apprendre à pénétrer dans son inconscient (nager sous l’eau). Ce n’est pas facile pour lui d’avancer dans ce monde inconnu. Il n’est pas très à l’aise ce qui peut expliquer son retard. Par ailleurs il ne doit pas respirer de peur d’être submergé, de disparaître, de retourner à l’état d’inconscience. Or à sa grande surprise il arrive à respirer sous l’eau sans être envahi. Il semble qu’il ait trouvé intuitivement cet état où son moi peut être en contact avec l’inconscient sans danger.

Nous pouvons remarquer que sa formation est très progressive, sécurisée. Il n’est pas lâché seul en pleine mer. Cela se passe dans une piscine avec la sécurité de l’autre bord qui ne semble pas très loin et avec l’encadrement de cette femme, Marie. Dans la réalité concrète ce rêveur fait un travail sur ses rêves. On peut considérer que ce travail correspond à cette formation dont le but est d’être à l’aise dans l’inconscient sans être submergé.

Mais Marie, la formatrice du rêve, n’est pas son interprète de rêve. Qui est-elle? Le rêveur dit qu’elle est une amie proche. C’est une femme très simple, très gentille qui ne se met jamais en avant. Elle a du mal à s’affirmer dans la vie, à s’exprimer. Elle reste dans l’ombre. Intérieurement elle est une ombre du rêveur qui est repoussée loin du moi. Le rêve montre qu’elle a une importance fondamentale pour lui, qu’elle peut lui apprendre à être à l’aise avec son inconscient mais pour cela il doit être à l’écoute de cette faiblesse en lui.

Dans les rêves les faiblesses peuvent également être représentées par une personne en situation de handicap comme dans le rêve suivant. Le rêveur était le même que pour le rêve précédent.

Rêve – Regarder attentivement et comprendre…

Je suis avec d’autres dans une petite pièce comme dans l’entrée de mon entreprise ou dans un stage de formation. L’animateur arrive. On me dit qu’il a eu un AVC au nez. Que c’est en lien avec le TGV.  Je suis étonné. Je savais qu’il avait eu un AVC mais au nez?

L’animateur nous explique ce qui est prévu. Il dit qu’un handicapé va venir nous faire une présentation ou un spectacle. Il nous faudra le regarder attentivement et comprendre… Il dit une phrase très alambiquée qui comprend plusieurs fois le mot « sens » dans des sens différents. Les autres font un oh! d’admiration. Moi, je n’ai pas trop compris.

L’animateur du rêve, le rêveur le connait bien. C’est un collègue. Il le décrit comme quelqu’un qui est très centré sur lui sur ses intérêts, son pouvoir. Il écoute peu les autres mais sait donner une bonne image de lui. Collectivement il est bien vu malgré des critiques qui se disent en privé. Il sait se faire bien voir par la hiérarchie qui lui a donné de grosses responsabilités. Il est centré sur l’action, autoritaire, efficace, pas psychologue. Il est extraverti alors que le rêveur est plutôt introverti. C’est une partie inconsciente du rêveur.

Dans le rêve nous comprenons que cette partie du rêveur a bien changé probablement grâce à son AVC. Cet AVC est en lien avec le TGV. Le TGV, Train à Grande Vitesse, peut exprimer ici que cette partie en lui qui est associée à la grande vitesse c’est-à-dire à son désir d’agir vite, efficacement, a eu un accident cérébral, un accident dans le fonctionnement de son cerveau. De cela le rêveur en est conscient par contre il ne sait pas que cet accident est en lien avec le nez. Le nez est l’organe de l’odorat qui nous permet de sentir. Intérieurement c’est sentir une ambiance, sentir quelqu’un par exemple dans l’expression « je ne le sens pas ». C’est un sens tourné vers l’intérieur des situations, qui permet de voir au delà des apparences. A lire la suite du rêve il semble que cet accident lui ai permis d’accéder à cette intériorité à ce sens subtil comme diraient les pratiquants de yoga.

Cette partie du rêveur a vraiment bien changé puisqu’il est maintenant formateur pour apprendre aux autres, et en particulier le rêveur (son moi conscient) à accéder à ce nouveau sens. Pour cela il leur demande de regarder attentivement et comprendre, c’est-à-dire assimiler, comment se comporte une personne en situation de handicap. Chacun sait que le manque, l’handicap permet à la personne de développer d’autres sens, d’autres capacités en réorientant l’énergie non utilisable vers d’autres directions. 

« Il dit une phrase très alambiquée qui comprends plusieurs fois le mot « sens » dans des sens différents. » Le moi du rêveur ne comprend pas. Il est perdu par cette phrase qui joue avec le mot « sens ». Pour lui elle ne fait pas sens! Pour l’instant il a à sa disposition une méthode qui est celle de chercher à regarder ses handicaps et à les comprendre ce qui un jour lui permettra d’accéder à ce sens.

Ce rêve nous montre que,  bien qu’il soit introverti, le rêveur a encore beaucoup de chemin à faire, de travail, pour accéder à l’invisible que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Bien que cela ne se voit pas à première vue il fonctionne comme son collègue dans l’urgence de l’action, la recherche de l’efficacité immédiate. L’évolution de l’image de ce collègue en lui va l’aider  à avancer sur ce chemin.

Ce rêve nous montre également que, contrairement à ce qui est admis en général, l’évolution d’une personne ne passe pas uniquement par l’effort du moi pour se changer mais aussi et souvent par une évolution dans son inconscient (ici le collègue) qui peut aboutir à une évolution du moi. Cette évolution de l’inconscient peut provenir d’évènement extérieurs ( par exemple un AVC), d’évènements intérieurs profonds qui ne semblent pas avoir de causes et aussi d’efforts du moi pour se changer même s’ils paraissent à postériori inadaptés.

Je ne résiste pas à faire le parallèle  entre l’orientation générale de notre société occidentale (et même mondiale) toute tournée vers l’urgence de l’action, la recherche de l’efficacité, de la vitesse, du pouvoir, la défense des intérêts particuliers… et l’attitude de ce collègue. Cette orientation générale pèse sur chacun d’entre nous comme une injonction plus ou moins consciente. Faudra-t-il que notre société, elle aussi, ait un AVC au nez pour qu’elle puisse sentir ce qui se trame?

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Lâcher prise, Libération

Dans les rêves le lâcher prise apparaît souvent associé aux toilettes, ce lieu où l’on se libère de tout ce qui encombre, de tout ce qui n’est pas utilisable, exploitable par le corps.  En général cela signifie se libérer de ce qui encombre le psychisme.

Nombreux sont les rêves où le rêveur est à la recherche de toilettes, n’en trouve pas ou se trouve dans l’impossibilité de les utiliser pour de nombreuses raisons : Elles sont bouchées, la porte ne ferme pas à clef, il y a une très grande queue pour y accéder … En voici un dans lequel la rêveuse a réussi à se libérer.

Rêve – Un caca énorme

La rêveuse travaille auprès d’enfants dans l’Éducation Nationale. Elle est dans un bâtiment administratif avec une collègue amie qui doit passer devant un jury pour présenter sa démission. Après avoir travaillé de nombreuses années à son poste actuel, cette collègue a décidé de partir pour une expérience au Canada. Elle a envoyé une lettre à sa hiérarchie pour annoncer sa démission mais aussi pour expliquer les raisons de son départ. Elle a beaucoup travaillé à cette lettre pour décrire son cheminement pendant toutes ses années de travail et montrer que son besoin d’aller vers autre chose est dans la continuité de son travail. Elle a très peur que sa responsable, qui est la présidente du jury, lui mette des bâtons dans les roues.

Voici comment la rêveuse parle de la suite de son rêve : Je lui ai dit : Moi je pense que cela va bien se passer.  Je me suis approchée d’elle et l’ai embrassée sur le front en lui disant : tout se passera bien. A ce moment là j’ai eu une envie subite d’aller aux toilettes. J’étais très pressée. J’y suis allée en disant à ma collègue que je reviendrai. Elle, elle attendait d’être reçue.

Je suis entrée dans les toilettes et j’ai fait un énorme caca. Çà n’arrêtait pas. Je me disais : les toilettes cela ne va pas suffire. Cela me paraissait complètement disproportionné, énorme par la quantité et la grosseur de ce qui sortait. J’étais très surprise et un peu inquiète.  Çà sortait, ça sortait, ça sortait. Puis à un moment j’ai tiré la chasse d’eau avec inquiétude. Apparemment le courant a été assez fort pour tout emmener et cela m’a vraiment fait beaucoup de bien. En sortant il y avait une petite fille. Je lui avais dit d’attendre pour pouvoir finir ce que j’avais à faire. Je lui ai dit qu’elle pouvait y aller maintenant.

Je suis retournée à l’endroit où il y avait le jury. J’ai aperçu mon amie à travers une vitre. Elle m’a regardée en faisant un petit signe. J’ai compris que que ce n’était pas tout à fait terminé mais que cela s’était bien passé. Elle avait été entendue. Puis l’entretien se termine, elle sort. Je la prends dans mes bras. Elle est contente, elle souffle.  Çà a marché.

Nous comprenons à la lecture de ce rêve que la rêveuse s’est réveillée dans une profonde détente. Cette détente, nous l’associons à celle de la rêveuse au moment où dans le rêve elle a réussi à se débarrasser de tout ce qui encombrait ses intestins. Mais elle est aussi celle de la rêveuse et de son amie quand elles apprennent que le jury a accepté la démission.  Il y a un parallélisme évident entre les deux histoires ( le caca et l’entretien avec le jury) qui se déroulent en même temps. Le parallélisme est même mis en scène à la fin quand l’amie fait signe que l’entretien s’est bien passé mais qu’il faut encore attendre, le temps d’attente correspondant au moment où la petite fille va aux toilettes.  Il semble que ces deux histoires soient là pour insister sur la synchronicité entre deux aspects du mécanisme de lâcher prise. L’un étant d’ordre physique, l’autre psychique.

L’amie et la petite fille sont deux parties inconscientes de la rêveuse, qui dans ce rêve, agissent de concert avec la rêveuse (son moi) pour que l’ensemble de sa personnalité (sa totalité ou Soi) aille vers un renouveau profond qui correspond à ce travail au Canada. A propos du Canada, la rêveuse indiquera que dans ce  pays il y a de nombreuses expériences novatrices dans le domaine de l’éducation. C’est pourquoi ce travail au Canada est très attirant pour elle.

Il faut noter que cette libération (ou l’acceptation de la responsable) a été possible grâce à l’action de l’amie pour faire le point sur ses années de travail et montrer que son besoin de renouveau était le résultat d’un cheminement. Le lâcher prise, même s’il arrive soudainement sans rapport avec notre volonté, est le résultat d’un travail. Un « travail » qui se fait en nous mais aussi par nos actions concrètes comme quand nous disons « travail sur les rêves ».

La tentation est grande pour la rêveuse de considérer ce rêve comme ce qui pourrait arriver par la suite c’est-à-dire comme un rêve prémonitoire. Elle se mettrait à rechercher du travail au Canada pour que le rêve se réalise ou elle se poserait sur un petit nuage en attendant que le rêve se réalise indépendamment d’elle. D’une façon générale ce n’est pas l’orientation qu’il faut privilégier.

L’attitude juste est plutôt de se mettre à l’écoute de soi et autour de soi pour repérer le renouveau, la vie qui est à l’œuvre afin de la laisser s’épanouir tout en repérant et en acceptant les forces qui refusent ce renouveau et nous maintiennent dans le passé.

Repérer de nouvelles attitudes qui apparaissent spontanément en nous  mais aussi des évènements indépendants de notre volonté. Pour la rêveuse, ces évènements pourraient être par exemple, mais pas nécessairement, des appels à ce qu’elle recherche un nouveau travail et pourquoi pas au Canada. Dans le cas présent cela sera probablement beaucoup plus subtil dans la mesure où la rêveuse est en retraite, que malgré une passion et un engagement pour son travail dans sa vie professionnelle elle n’est plus dans une attente concrète de ce genre.

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Perle d’un jour – sens de l’interprétation des rêves

Les personnes qui commencent ce travail sont attirées par les rêves, parfois, sans raison particulière, sans raison exprimable. Je dirais que c’est une attirance vers l’inconscient, l’intériorité, un besoin de comprendre, de se comprendre.

Ce besoin peut sembler provenir d’un mal être plus ou moins diffus. C’est peut-être plus précis. Elles ont des rêves difficiles qui reviennent souvent qu’elles associent ou non à des conflits intérieurs ou extérieurs. Elles cherchent à comprendre pour aller vers un mieux être.

Ces personnes débutantes veulent connaitre la signification de leurs rêves pour soulager, améliorer leur situation, la situation de leur partie consciente représentée par leur moi. Qu’est-ce que veut dire ce rêve? Elles ont la conviction que de savoir ce qu’il veut dire va les aider à être plus conscientes, à soulager leur mal être intérieur ou leur donner des éléments pour résoudre des situations difficiles à l’extérieur. Elles ont en partie raison.

Elles cherchent la méthode pour interpréter ou attendent de leur interprète ce que le rêve veut dire. C’est bien normal de vouloir comprendre ce qui gène en nous pour aboutir à un changement libérateur. C’est vrai que cette démarche peut aboutir à des évolutions ou solutions spectaculaires. Mais si elles restent dans cette attitude ces personnes deviennent dépendantes de cette aide que leur procure les rêves, l’inconscient, leur interprète. Elles utilisent l’inconscient pour leur propre satisfaction, pour leur pouvoir (le pouvoir de leur moi). Leur moi reste figé, n’évolue pas et l’inconscient, les rêves arrêteront de les aider. Elles n’auront plus envie de cette méthode qui ne leur apporte pas ce qu’elles cherchent et iront à la quête d’autres méthodes…

Bien que dans des moments difficiles elles peuvent retomber dans l’attitude décrite précédemment, les personnes qui font ce travail depuis suffisamment de temps s’aperçoivent peu à peu que leur motivation change. Leur motivation change parce que leur appréciation de ce qu’est la réalité, de ce qu’elles sont, change.

A force de fréquenter l’inconscient celui-ci devient plus proche, plus fréquentable. Il devient un ami, même si le dialogue est parfois musclé. La confrontation fait grandir chacun (le moi conscient et l’autre l’inconscient). Cette confrontation fait que je me sens moins seul, plus complet, de moins en moins dépendant psychologiquement des autres, des évènements extérieurs. Paradoxalement je ne m’éloigne pas des autres. Au contraire, étant plus indépendant je peux les rencontrer sans risque en étant plus moi-même et en acceptant tels qu’ils sont (Attention : contrairement à ce qui est souvent admis, être moi-même ce n’est pas exprimer tout ce que je pense sans tenir compte de ce qu’est l’autre sans le respecter.).

La conscience s’élargit, s’épanouit, les projections disparaissent. Le moi devient moins unilatéral, il s’assouplit. Une sensation de sécurité intérieure, d’unité apparait peu à peu. Unité de la personnalité, unité avec le monde extérieur. Cette unité avec le monde extérieur n’est pas un monde de bisounours où je plane sur mon petit nuage. Elle n’exclue pas la confrontation, les conflits, la souffrance… Cette unité, C.G. Jung lui a donné le nom de Soi en empruntant un terme indien. Pour les alchimistes c’est la Pierre philosophale. C’est aussi le Graal…

Cette fréquentation continue de l’inconscient, ce dialogue, font que les rêves évoluent et deviennent une aide précieuse pour se connaître au jour le jour dans son évolution, corriger ses attitudes  et même être alerté à l’avance pour agir plus justement. On obtient  l’aide tant souhaitée par les personnes débutantes dans ce travail, mais paradoxalement sans qu’elle soit désirée.

Le chemin vers cette unité est aussi un chemin vers l’acceptation de la vie telle qu’elle se présente au jour le jour, qu’elle soit agréable ou désagréable ce qui n’exclue pas les luttes pour une vie meilleure.

Ce chemin il peut être ressenti dans le poème Le Gallet.

Il peut être ressenti dans le poème suivant qui est apparu récemment dans un rêve.


Perle d’un jour

Perle d’un jour,
fracassée sur la pierre
 blanche à ses heures
Parfois sombre
Petite et forte

L’ombre te saisit

Attendre : c’est plus qu’un mot

Minuscule mais toujours là
Immobile au petit matin
et pourtant tu tourbillonnes
mais pour combien de temps?

Une nouvelle journée s’annonce
éclairée par à-coups
si dense
te recroqueviller, disparaitre
aller plus loin

Non tout simplement Non
Attendre

Voici ce que dit la rêveuse de son rêve et du poème:

Quand je me suis réveillée j’ai eu vraiment la sensation d’avoir écrit un poème en dormant mais je ne me souvenais plus de rien. Comme un rêve dont je ne me souvenais pas. C’était bizarre. Ce n’était pas un rêve comme d’habitude.

Peu à peu des mots se sont imposés très fortement en moi. « Perle d’un jour ». Je me suis dis : ce sont ces mots qui étaient dans le poème cette nuit. Les autres mots ne revenaient pas. Mais « Perle d’un jour » s’accrochaient en moi. C’était très fort. Je me suis dis : Cette perle c’est une perle de culture, une perle blanche. Perle d’un jour, elle est là, aujourd’hui mais elle peut être là tout le temps, éternellement. Et j’ai pensé à ces plongeurs aux bras nus, dans les iles, avec seulement un masque, qui vont chercher ces perles dans les barrières de corail au fond des océan, très en profondeur. 

Je me suis dis : Cette perle… c’est moi. Déjà je sentais autre chose. Les autres mots n’étaient pas loin. Il y avait une sorte d’intégration. Il fallait que ces mots passent dans mon corps pour que je les retrouve. C’était fort. Quelque uns revenaient par exemple : « tourbillonnent », « attendre ». Alors j’ai vraiment pris conscience que j’avais écrit ce poème cette nuit. Il fallait que j’écrive. Les mots étaient là mais pas vraiment formulés. Pour qu’ils reviennent il fallait que j’écrive. Je ne voulais pas forcément écrire mais cela s’imposait à moi, j’étais poussé à le faire. J’ai pris une feuille mais je ne savais pas quoi écrire. J’ai commencé par perle d’un jour et j’ai senti des sensations très fortes. Par exemple comme si je recevais un coup de poing en pensant au mot « fracassée »… J’incrustais les mots au fur et à mesure dans mon corps. C’était bizarre. Violent. Et le poème s’est écrit.

Cela  m’a donné une impression de globalité. Un état… un état pour traverser. Il y a des ressentis qui peuvent paraitre destructeurs mais des choses arrivent qui renouent autre chose… La perle est toujours là, elle est petite, minuscule. Il y a une espèce de mouvement qui peut paraitre turbulent, destructeur… et qui permet d’être là, d’être là. Et puis l’attente.

C’est une attente qui est pleine. L’attente c’est la réceptivité de tout se qui se passe en moi. C’est à la fois le fracas, le chaos, des éléments de force… Tous ces éléments font que ça traverse mais une attente est quelque part nécessaire. Attendre? Au début cela me paraissait bizarre. J’attends quoi? Je n’attends rien mais ce n’est pas une attente où il ne se passe rien. Cette attente elle est nourrie.  C’est à la fois statique , le mot « immobile », mais aussi un mouvement très fort par pleins de mots comme « tu tourbillonnes », « fracassée ».

Et tout cela ça permet d’être là. Tout simplement. Au final ça paraît petit.

Je ne voulais pas écrire, je ne voulais pas. Cela s’est imposé. Il y avait des mots qui se présentaient et en même temps une résistance en moi. C’était surprenant. Dès que j’ai commencé à écrire cela a continué. Quand j’ai relu le poème il y a des mots qui m’ont surpris mais ils étaient sortis comme ça. Alors je me suis dit : ne touche à rien.

Cette histoire de perle c’était en dehors de moi. J’étais là et en même temps je me suis dit : Cette perle c’est moi. Cette perle c’est quelque chose de très petit mais dur quand même. Elle peut rouler, se retourner, elle peut se mettre partout. Elle est très souple, très mobile et en même temps très dure car elle se fracasse aussi. Quand j’en parle je suis complètement nourrie par elle. Je la porte depuis ce rêve. C’est très étrange. Elle est là. C’est une présence forte. C’est une espèce de présence dans le mouvement, une présence d’accompagnement. Elle est en moi, dedans et dehors. Elle fait partie d’un tout. C’est moi mais c’est pas moi. Je ne sais pas comment expliquer ça. C’est plus que le moi, ça le dépasse.

Que rajouter ? Peu de choses de peur que des explications, une interprétation polluent cette expression spontanée, vivante.

Nous aurons reconnu dans la perle un symbole du Soi , de la totalité de la personnalité dans laquelle le moi n’est qu’une petite partie.

Notons également les difficultés auxquelles la rêveuse a dû faire face pour exprimer, incarner ce message qui lui est venu des profondeurs. 

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Un rêve qui a guidé C.G. Jung vers l’inconscient collectif

Le rêve qui suit et les commentaires sont issus du livre « MA VIE » Souvenirs, rêves et pensées C.G. Jung  Recueillis et publiés par Aniéla Jaffé    Éditions Gallimard  collection folio.

[Un rêve] fut important pour moi, car il me conduisit pour la première fois à la notion d’ « inconscient collectif »…

Je me trouvais dans une maison à deux étages, inconnue de moi. C’était « ma maison ». J’étais à l’étage supérieur. Une sorte de salle de séjour avec de beaux meubles de style rococo s’y trouvait. Aux murs, de précieux tableaux étaient suspendus. J’étais surpris que ce dût être ma maison et je pensais : « Pas mal! » Tout à coup me vint l’idée que je ne savais pas encore quel aspect avait l’étage inférieur. Je descendis l’escalier et arrivai au rez de chaussée. Là tout était plus ancien : Cette partie de la maison dataient du XVe ou du XVIe siècle. L’installation était moyenâgeuse et les carrelages de tuiles rouges. Tout était dans la pénombre. J’allais d’une pièce dans une autre, me disant : je dois maintenant explorer la maison entière! J’arrivais à une lourde porte, je l’ouvris. Derrière je découvris un escalier de pierre conduisant à la cave. Je le descendis et arrivai dans une pièce très ancienne, magnifiquement voûtée. En examinant les murs je découvris qu’entre les pierres ordinaires du mur étaient des couches de briques, le mortier en contenant des débris. Je reconnus à cela que les murs dataient de l’époque romaine. Mon intérêt avait grandi au maximum. J’examinai aussi le sol recouvert de dalles. Dans l’une d’elles je découvris un anneau. Je le tirai : la dalle se souleva, là encore se trouvait un escalier fait d’étroites marches de pierre, qui conduisait dans la profondeur. Je le descendis et parvins dans une grotte rocheuse, basse. Dans l’épaisse poussière qui recouvrait le sol étaient des ossements, des débris de vases, sortes de vestiges d’une civilisation primitive. Je découvris deux crânes humains, probablement très vieux, à moitié désagrégés. — Puis je me réveillai.

Il était clair que la maison représentait une sorte d’image de la psyché, autrement dit de ma situation consciente d’alors, avec des compléments encore inconscients.  La conscience était caractérisée par la salle de séjour; elle semblait pouvoir être habitée malgré son style vieillot.

Au rez de chaussée, commençait déjà l’inconscient. Plus je descendais dans la profondeur, plus tout devenais étrange et obscur. Dans la grotte je découvris les restes d’une civilisation primitive, autrement dit le monde de l’homme primitif en moi; ce monde ne pouvait guère être atteint ou éclairé par la conscience. L’âme primitive de l’homme confine à la vie de l’âme animale, de même que les grottes des temps primitifs furent le plus souvent habitées par des animaux avant que les hommes ne s’en emparassent pour eux-mêmes…

Le rêve venait ajouter à ma situation consciente … d’autres couches de consciences : le rez de chaussée au style moyenâgeux, depuis longtemps inhabité, puis la cave romaine et enfin la grotte préhistorique. Elles représentaient des époques révolues et des niveaux de conscience dépassés…

Il remontait, de toute évidence, jusqu’aux bases de l’histoire des civilisations, qui est une histoire de stades successifs de la conscience. Il décrivait comme un diagramme structural de l’âme humaine, une condition préalable de nature essentiellement impersonnelle. Cette idée eut pour moi force d’évidence : it clicked, comme disent les Anglais; et le rêve devint pour moi une image directrice, qui, par la suite, se confirma dans une mesure alors imprévisible. Par ce rêve, je soupçonnais pour la première fois l’existence d’un à priori collectif de la psyché personnelle, à priori que je considérai d’abord comme étant des vestiges de modes fonctionnels antérieurs. Ce n’est que plus tard, lorsque se multiplièrent mes expériences et que se consolida mon savoir, que je reconnu que ces modes fonctionnels étaient des formes de l’instinct, des archétypes.

La  citation précédente de C.G. Jung  est issue du Chapitre Sigmund Freud (à partir de la page 186) du livre « MA VIE » Souvenirs, rêves et pensées C.G. Jung . Elle omet les phrases de Jung concernant sa relation avec Freud et leurs conceptions différentes dans la compréhension des rêves et en particulier celui qui est cité. Ce sujet n’est pas dans l’objectif de cet article.

Si besoin voir Inconscient collectif dans le glossaire.

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